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Sûreté et sécurité

Vidéosurveillance et sécurité : faut-il avoir peur des GAFAM ?

Forts des plus importantes capitalisations boursières du monde, Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft disposent de gigantesques moyens pour investir en R&D. Ils utilisent leurs assistants vocaux comme cheval de Troie pour envahir nos logements. Ainsi misent-ils d’abord sur le marché de la sécurité en résidentiel et petit tertiaire.

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Google Nest commercialise des caméras domestiques out-door, comme celle-ci, et in-door.
© D.R.

Vous utilisez sûrement la fonction vocale « OK Google » sur votre smartphone. Dans son sillage, la firme de Moutain View a sorti Google Home. Avec cette enceinte, intelligente, vous lancez à la voix des recherches sur internet. Mais elle sert aussi à piloter la lumière, la température et tout autre objet qui lui est relié. Début 2020, Google annonçait que son assistant vocal comptait 500 millions d’utilisateurs actifs par mois. Ainsi Google Assistant est-il disponible dans plus de 90 pays et 30 langues. Dans son sillage, Siri d’Apple en référence 375 millions utilisateurs et Alexa d’Amazon seulement 50 millions. Loin derrière, on retrouve Bixby de Samsung. Les acteurs français de la sécurité doivent-ils avoir peur des GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) ?

Plus besoin d’installateurs professionnels

Bien sûr que oui ! Et à plus d’un titre. Pour l’heure, on ne voit pas les GAFAM sur le secteur de la sécurité pour les professionnels. Mais, dès 2017, la Capeb (1) avait tiré la sonnette d’alarme lors des Journées professionnelles de la construction. À l’époque, selon une enquête de 3CA-BTP, les électriciens du BTP étaient passés de 75 000 salariés en 2009 à 68 000 en 2014. « Une perte de 10 % des effectifs », constatait le président de l’Una 3E (2). « En 10 ans, leurs recettes ont fondu de 13 % en raison de l’atonie du marché du logement neuf », mesurait Sophie Breton, alors présidente du syndicat Ignes (3) – remplacée par Benoît Coquart. Il faut dire que les équipements de sécurité des GAFAM s’affranchissent des installateurs. En effet, c’est le consommateur qui les installe et les utilise tout de suite.

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Ce détecteur automatique de fumées repère également le très toxique monoxyde de carbone. © D.R.

Les assistants vocaux, nouveaux chevaux de Troie

Ensuite, les assistants vocaux deviennent des passages obligés pour les produits domotiques et sécuritaires. De son côté, Jeff Bezos, patron d’Amazon, a annoncé qu’Alexa se retrouvait déjà dans plusieurs centaines de millions d’objets connectés. Pour sa part, Google Assistant enregistre une compatibilité avec 400 marques et 5 000 produits ! Non seulement pour le marché résidentiel mais aussi pour le marché du petit tertiaire. Citons les marques Awair (analyse de l’air), IQ (caméras), Netatmo (alarme), Netgear (caméras), Philips (éclairage), Somfy (automatismes domotiques et sécuritaires)…

Google : vers un système global

Ajoutons que les enceintes connectées affichent des prix plancher : À partir de 40 euros pour Google Nest Mini chez La Redoute. À cela, la firme de Mountain View ajoute Google Nest Wifi, un routeur pare-feu. Grâce aux protocoles WPA2 et WPA3, celui-ci crée une barrière de sécurité entre le réseau local Wi-Fi et Internet. Objectif : protéger l’installation contre les tentatives de connexion indésirable. Ensuite, Google Nest propose non seulement des DAAF (4) connectés qui, outre les fumées, détectent aussi le CO (5). Mais aussi un portier vidéo (190 euros) ainsi que des caméras de vidéosurveillance in-door (350 euros) et out-door (250 euros). Ce n’est plus un tsunami. C’est une montée des eaux planétaire !

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L’application Alfred de Deskshare a été téléchargée 10 millions de fois. Elle est compatible avec les caméras ONVIF. © D.R.

245 applications de vidéosurveillance sur smartphone

Caracolant en tête, Google a les moyens d’organiser sa propre concurrence. Pour preuve, on ne trouve pas moins de 245 apps de télésurveillance ! Même Dahua, HIKvision ou Netatmo en ont publié. Normal. Transformation digitale oblige, dès qu’un fabricant de caméra lance un nouveau produit, celui-ci s’accompagne d’une app. Certains acteurs innovent et rencontrent le succès. Citons Alfred de Deskshare qui prend automatiquement en charge toute caméra ONVIF sur le réseau local – même les PTZ. Notée d’un joli score de 4, l’application a fait l’objet de 10 millions de ventes ! Même score pour tinyCam Monitor de Tiny Solutions.

Les francs-tireurs

Ensuite le Store de Google distribue des apps qui convertissent n’importe quel smartphone en caméra de vidéo surveillance. Attention, il y a tout et n’importe quoi. Bien que, en majorité, les notes s’étagent entre trois et quatre étoiles sur cinq. Exemple : EPS Télésurveillance notée 3,6. Pourtant bien suivie, avec une MAJ au 5 mai 2020, elle compte plus de 100 000 installations. Mais les avis sont implacables. « Pas possible de désactiver l’alarme avec l’app, soi-disant pour des raisons de sécurité », indique Stéphane. « Enfin, après 6 mois de réclamation, le problème de service vidéo avec Android 10 OneUI est fixé. Trop long… », renchérit Carmo Leong. « Application facile d’utilisation et très pratique suivre certaines informations », tempère Philippe Delbauve.

Des installations par millions

Notée 4,1, bénéficiant d’une MAJ récente (16 mai), l’app WardenCam est une star. En effet, elle cumule plus de 5 millions d’installations ! Point fort, elle convertit un vieux smartphone Android en caméra de vidéosurveillance accessible et contrôlable via internet. L’application offre une large de fonctionnalités : Détection de mouvement, enregistrement vidéo, alerte e-mail et mobile des événements, audio bidirectionnel. Mais aussi stockage et enregistrement directement dans le Cloud Google de l’utilisateur, haute définition vidéo et audio. Il faut connecter le smartphone avec un compte Gmail en tant que « caméra » et « spectateur ». Il suffit de l’installer à l’endroit et dans la direction souhaitée et le tour est joué.

Contre-attaque européenne sur le cloud

Une chose est sûre : Les GAFAM ne vont pas se contenter de distribuer des produits de sécurité connectée. Ils vont les utiliser pour entraîner leurs algorithmes d’intelligence artificielle dans leur propre Cloud. Et conforter leur avance en attendant de s’attaquer au marché de la sécurité pour les professionnels. Une des parades serait d’utiliser un cloud souverain. Sur ce terrain, la startup Rapid.Space fournit une alternative européenne pour un Cloud souverain 100 % Open Source. « Cette offre fusionne toutes les couches d’un Cloud mondial et un réseau de télécommunications 5G, décrit Jean-Paul Smets, PDG de Nexedi. Ce Cloud s’affranchit des réglementations extra-territoriales, comme le Cloud Act américain. En effet, dans chaque pays, même en Chine, une société de droit local possède les machines mais pas l’exploitation du système. » Ce pied de nez donne de l’espoir aux PME européennes de la sécurité. Notamment aux acteurs de la télésurveillance et de la vidéosurveillance qui veulent se déployer à l’international sans perdre leur liberté.

Erick Haehnsen

(1) Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment

(2) Union nationale des artisans électriciens, électrotechniciens et électroniciens

(3) syndicat professionnel des Industries du génie numérique, énergétique et sécuritaire (3)

(4) Détecteur automatique autonome de fumées

(5) Monoxyde de carbone

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