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Risques industriels et environnementaux

Les mesures annoncées par Marisol Touraine pour contrer Ebola ne convainquent pas Force ouvrière-ADP

La ministre des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes vient d'annoncer le lancement ce samedi du contrôle systématique des voyageurs en provenance de Guinée à destination de l'aéroport Paris-Charles-de-Gaulle. Ce début de réponse laisse sceptique une partie du personnel des Aéroports de Paris (ADP) qui déplore le mutisme de leur hiérarchie.

Si le traitement d’Ebola est un mystère médical, le silence de la direction des Aéroports de Paris en est un autre pour son personnel. « Il n’y a aucune procédure au niveau de l’entreprise en dehors des équipes du service médical d’urgence. Sur ce type de problématique, ils s’en remettent aux autorités. Pour la fièvre aphteuse et le H1N1, c’était pareil. Si l’Etat ne fait rien, ils n’agissent pas », regrette Christelle Martin, représentante syndicale de Force ouvrière dans les huit comités d’hygiène, de sécurité et de conditions de travail d’Aéroports de Paris (ADP). L’inquiétude grandit parmi les 80.000 salariés de Paris-Charles-de-Gaulle et les 30.000 de l’Aéroport d’Orly. Chaque année, les deux aéroports accueillent respectivement 62 millions et 28 millions de passagers. Et les mesures annoncées ce jeudi par Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des Femmes, ne vont pas apaiser ce sentiment d’abandon. « Ça permet à l’employeur de répondre partiellement à l’obligation de garantir la sécurité à ses employés. Mais la période d’incubation est de 21 jours d’après les informations disponibles à ce jour », souligne Christelle Martin.

Un vol par jour part de Conakry à destination de Paris. Dès ce samedi 18 octobre, la Croix-Rouge renforcera les équipes médicales en place à Conakry (Guinée) pour poursuivre les contrôles de température sur les passagers à destination de l’aéroport Paris-Charles-de-Gaules. Un questionnaire de traçabilité leur sera distribué pendant le vol. Arrivés sur Paris, ils subiront une deuxième prise de température effectuée sur la passerelle par le personnel du service médical d’urgence et de soin de l’aéroport Paris-Charles-de-Gaulle. Le dispositif paraît dérisoire aux yeux de la syndicaliste. Un seul vol par jour part de Conakry en direction de la capitale française. De nombreux passagers au départ du Liberia, de Sierra Léone et du Sénégal transitent par la Belgique, le Portugal et le Maroc en direction d’Orly ou de Roissy sans que le personnel parisien ne connaisse leur provenance. Le ministère a toutefois précisé, sans plus de détails, que des contrôles étaient également effectués au départ des vols en provenance du Liberia, du Nigeria et de Sierra Leone et à destination des aéroports de Paris.

Selon une récente étude menée par la City University London et la Toulouse School of Economics, les règles de mise en quarantaine trop strictes encourageraient les malades à ne pas se manifester même lorsqu’ils pensent avoir été exposés au virus. « Il ne faut pas tomber dans la psychose mais nous sommes en manque de réponses. Je ne sais pas si le transport des animaux a été interdit. Et si des personnes dont les symptômes n’étaient pas encore déclarés se rendaient ici pour demander des soins ? En Europe on a de bons dispositifs de santé mais le manque de moyens est flagrant dans ces pays [d’Afrique de l’ouest, NDLR]. Je maintiens depuis le début qu’il est nécessaire d’appliquer le principe de précaution pour assurer la sécurité. Il faut bosser à l’endroit même de la pandémie et agir à la source », analyse Christelle Martin qui s’inquiète de l’évolution de la situation.

Lors du dernier comité d’hygiène, elle a réclamé des séances d’information pour le personnel au contact avec le public ainsi que des gants, des masques et des désinfectants pour les mains. Sa demande est restée sans réponse. « On achète du désinfectant et on le fait circuler lorsqu’on n’a pas le temps d’aller se laver les mains. Les collègues de la sûreté et les équipes de nettoyage se posent aussi des questions », développe Christelle Martin. L’arrivée de l’hiver et les symptômes grippaux qui l’accompagnent risquent de renforcer la confusion dans les équipes. Force ouvrière avait également demandé à la Direction des ressources humaines l’activation des caméras thermiques sur chaque arrivée de vol en provenance des pays à risque. Là encore, le silence demeure. A l’instar de ses collègues, elle n’a d’autre choix que de s’informer sur les symptômes et les modes de transmission en naviguant sur le site Internet de l’Organisation mondiale de la santé et par les médias. « Nous avons des inquiétudes. Et on peut se demander si elles ne sont pas minimisées pour ne pas entraîner une chute du trafic aérien », conclut Christelle Martin.

Elodie Armand

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