Gérer les risques
Aujourd'hui et demain

Risques industriels et environnementaux

L’EPI antichute tend vers le multifonction

Plus légers et plus design, les EPI antichute se dirigent aussi vers le multifonction pour répondre aux besoins de productivité et de sécurité des utilisateurs et de leur entreprise.

Chaque année, plus de 10 % des accidents du travail avec arrêts sont dus aux chutes de hauteur, prévient l’INRS en précisant qu’il s’agit de la 2e cause d’accidents mortels. Tous les secteurs sont concernés. En cause, l’absence d’équipement de protection individuelle (EPI) ou l’inadéquation de la protection.
« Lorsque nous faisons une formation intra entreprise, nous constatons bien souvent que la dotation de l’équipement antichute n’est pas adaptée au besoin de son utilisateur », rapporte Bernard Cuny, le président du Syndicat national des acteurs du marché de la prévention et de la protection (Synamap). Lequel rappelle que le travail en hauteur réclame une analyse de risque préalable et que le choix d’un EPI antichute est une affaire complexe. « Pour assurer la sécurité de l’opérateur, trois éléments sont indispensables : le système de préhension du corps (le harnais par exemple), la liaison antichute (la longe) et le point d’ancrage. »
Bien souvent, le port de ces produits est vécu comme une contrainte par l’utilisateur. D’où les efforts des fabricants pour les rendre plus légers et plus design. Face aux mastodontes comme Honeywell (anciennement Sperian), Capital Safety, qui regroupe les marques DBI Sala, Protecta et Uniline, les PME rivalisent aussi d’ingéniosité. Citons, entre autres, Accsys, Gamesystem, Innotech, Petzl et Safety Concept. Lequel innove avec le Lux-top RVT, un point d’ancrage qui absorbe la force d’une chute en se déformant sur plusieurs zones. Citons aussi Froment, qui réunit sur un seul appareil multifonction baptisé Caméléon un antichute mobile, un bloqueur sur corde et un tendeur de longe. Mieux, il est équipé d’un système d’ouverture double sécurité qui s’actionne d’une seule main et d’une fermeture à verrouillage automatique.

Diamètre de 10 mm

Sous la pression réglementaire et normative, les EPI antichute ont considérablement évolué en l’espace d’un demi-siècle. « Côté légèreté, les matériaux composites gagnent du terrain au niveau, notamment, des carters et des enrouleurs. Quant aux cordes, elles sont passées d’un diamètre de 14 ou 16 mm en fabrication toronnée, à 10 mm pour un poids de 90 g par mètre », reprend Bernard Cuny.
Les efforts des fabricants portent également sur la réduction de l’allongement de la corde, la diminution des efforts et le confort de la longe. En témoigne la longe élastique à absorption d’énergie Pro Stretch de Capital Safety. Disponible en plusieurs longueurs et avec différentes combinaisons de connecteurs en acier et en aluminium, elle intègre sur toute sa longueur un absorbeur d’énergie. Pour sa part, Petzl innovera, début 2012, avec une longe de progression élastique pour réduire les traumatismes en cas d’accident. Point fort, elle intègre un indicateur de chute, un fil vert qui disparaît lorsque la corde doit être mise au rebut en raison d’une chute trop importante.
Honeywell n’est pas en reste côté innovation avec un système qui prévient les chutes. Teeker est un dispositif de maintien qui intéresse les travailleurs isolés. Il est constitué d’une ceinture intégrant une sangle autoréglable qui s’enroule quand l’opérateur recule. Mais lorsque ce dernier veut avancer, il doit appuyer sur un bouton. Ce qui limite son rayon de déplacement et lui évite de se trouver dans une zone à risque de chute.

Filet breveté

Si les opérateurs se montrent en général très vigilants lorsqu’ils se trouvent au bord d’une terrasse ou d’une toiture, ils le sont moins quand ils sont à proximité des lanterneaux. Or, les risques de chute existent et sont même plus fréquents qu’on l’imagine. C’est du moins la conviction d’Innotech qui se distingue avec un filet de sécurité à poser sur les lanterneaux. « Ce produit est optimal pour les travaux de courte durée et peut servir comme une protection individuelle ou collective », fait valoir Alain Mattignon, directeur commercial de l’entreprise dont le siège est en Autriche. Le filet se pose sur le lanterneau et se fixe très simplement autour de son châssis grâce à un tendeur intégré à une sangle. Faisant office de point d’ancrage, cette dernière est reliée à la longe de l’opérateur qui peut travailler ainsi dans des conditions de sécurité optimales. « Nous avons déposé un brevet sur ce produit destiné aux couvreurs, étancheurs, et aux techniciens de maintenance qui opèrent sur le toit », poursuit le dirigeant qui fournit également une longe temporaire et polyvalente utilisable aussi bien avec des points d’ancrages fixes qu’avec une ligne de vie tirée entre deux points d’ancrage.

Pas une chute en dix ans
Acroterre, spécialisé dans les travaux de grande hauteur, a développé une méthodologie pour éviter les accidents.
Avec sa dizaine de collaborateurs, Acroterre, une entreprise spécialisée dans les travaux de grande hauteur intervient aussi bien sur les barrages, que les châteaux d’eau les cheminées ou encore les clochers d’église. Son dirigeant, Gwenael Jousselme a mis a profit ses dix années d’expérience de cordiste pour développer une méthodologie qui réduit les risques de chute. En l’espace de dix ans, elle ne déplore aucun incident dû au travail en hauteur. Et pour cause, lorsqu’un de ses collaborateurs arrive sur un chantier, il a en tête le plan de sécurité mis au point avec le client. Ce document énumère l’ensemble des risques inhérents à l’intervention et indique précisément qui fait quoi pour chacun des points répertoriés. Le plan doit être signé par le client puis retourné à Acroterre, qui le remettra à l’équipe d’intervention.
Journée de sensibilisation. « Nous bâtissons un plan sécurité pour chacune des interventions et ce, quelle qu’en soit la durée », explique Gwenael Jousselme, dirigeant d’Acroterre. Chaque collaborateur sait qu’il doit s’attacher, mais chacun a la liberté de choisir ses points d’ancrage. « Nous passons régulièrement sur les chantiers pour vérifier que les EPI (casques, chaussures, harnais, etc.) sont bien portés », ajoute le dirigeant qui effectue chaque année un contrôle des équipements. « Nous avons suivi une formation chez Petzl qui détermine les points de vérification des équipements. Au moindre doute, l’équipement est mis au rebut. » Globalement, ses cordistes sont rééquipés à neuf tous les ans. La direction se montre très attentive à l’état du matériel. Lorsque ses cordistes rentrent de mission, ils lui font un rapport sur les difficultés rencontrées. Enfin, chaque année, ses collaborateurs effectuent une journée de sensibilisation organisée par l’OPBTP pour un rappel à la sécurité. Une piqûre de rappel bien utile pour éviter les accidents.

Des produits plus design

Non contents d’être plus sûrs, les produits se veulent aussi plus design afin de susciter l’envie de les porter. A commencer par les harnais proposés par Accsys. Cette PME, créée en 2001 par un spécialiste du travail en hauteur, distribue des produits de l’Allemand Skylotec, fabricant de produits antichute depuis soixante ans. Parmi lesquels citons le Sirro. « Il s’agit d’un harnais qui s’enfile comme une veste », explique Gérald Loyer, responsable commercial chez Accsys. Nouveauté, le harnais n’a plus de sangle au niveau des épaules car c’est toute la partie du textile (un tissu respirant microperforé) qui assure la sécurité de l’utilisateur. Le harnais est donc plus confortable, plus facile à enfiler et surtout plus léger. En renforçant les coutures de sécurité, Skilotec a limité le nombre de boucles métalliques nécessaires. Résultat, le Sirro 5 destiné au métier de l’énergie, de l’éolien et des télécoms ne pèse que 1,5 kilo contre 3,5 kilos pour ses concurrents.
Autre grande tendance dans le secteur des EPI antichute, c’est de répondre aux besoins métiers des utilisateurs sachant que chaque secteur a ses contraintes. Honeywell l’a bien compris en fournissant des kits pour travailler en toiture, sur un échafaudage ou sur une nacelle. Ces packs métier comprennent en général un harnais, un produit d’ancrage et de connexion, une longe absorbeur d’énergie et des mousquetons.

Produit multifonction

Certains travaux réclament une double protection. En plus de l’EPI antichute, il s’agit de prévenir un autre risque. C’est le cas notamment du travail en grande hauteur à proximité de l’eau. Un marché visé par Capital Safety qui commercialise, sous la marque DBI Sala, un harnais Exofit XP avec gilet de sauvetage intégré. A savoir, un vêtement de flottaison individuel qui équipe en général les personnes travaillant à proximité de l’eau (construction de ponts ou de barrages, traitement des eaux usées, plates-formes pétrolières, etc.). Comme tous les Exofit, il dispose d’un système de verrouillage qui empêche le harnais de glisser pendant que l’opérateur travaille.
Accsys, qui développe aussi des produits sous sa propre marque Safetypack, se positionne également sur la double protection avec le FireJack. Cet antichute combine une veste de protection antifeu combinée à un harnais antichute et comporte des bandes haute visibilité. « Cet EPI protège les soudeurs et les oxycoupeurs ou tout opérateur amené à faire des opérations de soudage ou de découpage à point chaud », reprend Gérald Loyer. Lorsque cette opération se fait en grande hauteur, il y a non seulement un risque de chute mais aussi de brûlure en cas de projection d’étincelle ou de métal en fusion. Pour protéger les sangles du harnais, ce dernier est intégré dans la veste antifeu, qui comporte, à l’extérieur, des boucles métalliques devant et dans le dos. La veste supporte les flammes de contact grâce à sa composition : de la laine technique (comme celle que portent les pompiers) pour l’extérieur et du preox Kevlar pour la doublure. Disponible en taille standard, la veste peut être taillée sur mesure et fournie avec un pantalon.

 

Evacuation d’urgence

Décidément très créatif, le fabricant présente un système d’évacuation d’urgence pour les opérateurs travaillant à bord de nacelle. Présentée cette année, il s’agit d’une valise très compacte contenant un sac étanche et scellé, lequel renferme des EPI de catégorie 3 (prévus pour les risques mortels). A savoir : des mousquetons qui se connectent à la nacelle et au harnais de l’opérateur et un évacuateur (système de freinage) raccordé à la corde. Grâce à quoi, l’opérateur dispose d’une assistance pour descendre de manière fluide et sans à-coup. Mieux encore, comme ce kit n’est utilisable qu’en cas d’urgence, le sac étanche est pourvu d’un hublot qui permet de vérifier chaque année que le kit n’est pas en contact avec de l’humidité. Dès lors que le sac n’a pas été ouvert, cet EPI ne subira une révision complète que tous les huit ans.
L’idée d’un système d’évacuation et de sauvetage en cas d’urgence (incendie, gaz, accident corporel) est également exploitée par Honeywell. Ce dernier a développé avec des fabricants d’éoliennes et des opérateurs de maintenance une valise « Miller SafEscape Elite » qui se range en haut des turbines. La valise hermétique peut être gardée pendant dix ans et fait l’objet d’une formation spécifique.

Portique de sécurité

A l’instar de l’éolien, le monde du transport a des besoins très spécifiques, qui nécessitent non seulement de limiter la distance de chute mais aussi de s’adapter à la forme et à la surface du véhicule. Gamesystem apporte une réponse pour le dépotage des camions et des wagons. L’entreprise, présidée par Bernard Cuny, a conçu un portique métallique ancré au sol et qui supporte un rail ou un câble sur lequel s’accroche un chariot (point d’ancrage mobile) et un enrouleur antichute. Ce qui évite à la personne de tomber. Surtout, tout l’effort dû à l’arrêt brutal se transmet à la structure. « Pour chaque installation, nous réalisons une étude afin de nous assurer que la structure va résister aux efforts », ajoute Bernard Cuny qui insiste sur la nécessité de réaliser une analyse de risque avant tout travail en hauteur, sachant que le produit n’est qu’un élément de réponse pour protéger l’opérateur. Il faut aussi penser à la formation !
© Eliane Kan/TCA-Innov24

La formation aux EPI antichute est obligatoire
Le code du travail oblige les employeurs à informer leurs salariés sur l’utilisation des harnais, longes, enrouleurs et autres EPI antichute et sur leurs conditions d’entretien et de stockage. Le législateur impose aussi que les salariés soient formés et entraînés au port des EPI dans les conditions de travail réelles, sur une toiture, un échafaudage, un pylône, etc.
Idem pour les salariés travaillant sur corde et qui doivent, en outre, suivre une formation aux procédures de sauvetage. Enfin, le travail sur nacelle élévatrice est soumis à une autorisation de conduite obligatoire délivrée par l’employeur. Ce dernier ne peut l’accorder qu’à condition que l’employé ait effectué sa visite médicale, qu’il ait subi un contrôle des connaissances et du savoir-faire de l’opérateur et qu’il ait une connaissance des lieux et des instructions à appliquer.
Enfin, rappelons que depuis le 1er septembre 2004, les échafaudages ne peuvent être montés et démontés ou modifiés que par des personnes ayant reçu une formation adéquate.
Pour plus d’info : consulter le site matieres.fr

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