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HD contre mégapixels | De quoi parle-t-on réellement ?

« Caméras HD », « dômes mégapixels »… La haute résolution est devenue un argument dominant du discours technologique en vidéosurveillance. Pour ne pas dire le sujet le plus rebattu dès lors qu’il s’agit de parler d’image. Comment s’y retrouver ?

Dans un domaine encore très largement équipé en caméras analogiques standard, la haute résolution s’approprie, en effet, une part consistante du buzz technologique. A raison, puisque les formats HD sont annoncés comme les résolutions standard de demain. On observe ainsi que la course aux pixels, entamée depuis plusieurs années, tend à se stabiliser autour de résolutions suffisamment raisonnables, entre 1 et 3 mégapixels, pour être exploitées sans trop de contraintes, avec fluidité. L’offre des fabricants s’est donc structurée autour des formats HD 720p (HD Ready) et 1080p (Full HD), permettant un enregistrement en continu, à fréquence d’images satisfaisante, de 12,5 à 25 fps.
En parallèle, les formats d’image égaux ou supérieurs à 3 millions de pixels sont exploités au travers de solutions innovantes, capables de réaliser des compromis entre les performances de la haute résolution (capacités de zoom dans l’image, performances d’analyse vidéo, possibilités de réduire le nombre de caméras) et ses contraintes (charge de la bande passante, stockage). Il reste que la diversité des formats d’image rencontrés sur le marché peut dérouter et poser quelques difficultés de lecture : qu’appelle-t-on au juste résolution « HD » ? Quelles sont les différences avec les formats mégapixels « non HD » ? Quelles sont les caractéristiques d’une image haute résolution et que peut-on en attendre en termes d’applications ?

Question de formats

Au sens strict, le terme « mégapixel » désigne tout format d’image dont le nombre de pixels atteint ou dépasse 1 million. Sur le marché de la vidéosurveillance, plusieurs résolutions appartiennent à cette famille : 1,2, 1,3, 2,1, 3,1, 5, 8… jusqu’à 20 millions de pixels (le dôme panoramique AV20185DN d’Arecont Vision). Avec sa caméra expérimentale, équipée de 4 capteurs de plus de 8 mégapixels, NHK atteint une résolution de l’ordre de 33 millions de pixels. Il n’y a pour ainsi dire pas de restrictions quantitatives, comme l’indiquent depuis des années les capteurs des appareils photo numériques. Il existe cependant des limites d’exploitation, dès lors qu’on aborde le terrain de la vidéo : « Plus l’image est lourde, plus le traitement est complexe, indique Nicolas Baumann (Dallmeier). On entend parler de caméras équipées de capteurs de plus de 30 mégapixels… mais comment exploiter de telles images de manière fluide ? Ce sont des formats pertinents en photo, pas en vidéo. »
Depuis l’essor de l’IP sur le marché de la vidéosurveillance, les formats HD et mégapixels coexistent et constituent aujourd’hui une part importante de l’offre des constructeurs d’équipements. Il est fréquent de voir apparaître une même caméra en définition standard et en version haute résolution. Historiquement, les formats mégapixels se sont développés avant qu’une normalisation soit proposée avec les formats HD. « Dans ce cadre, explique Xavier Sanchez (Axis), les fabricants cherchaient à obtenir davantage de détails dans l’image, donc de points affichés. Il s’agissait de fournir des formats d’agrandissement, dans l’intention de réduire le nombre de caméras pour la surveillance d’une scène. Dans ce contexte, les possibilités de l’IP permettaient d’apporter une différence notable sur le marché de la vidéosurveillance : la CCTV traditionnelle proposant des résolutions limitées, le domaine de l’IP offrait des potentiels “illimités” en matière de résolution. Quand un fabricant annonce qu’il peut désormais proposer des images supérieures à 1 million de pixels, l’impact psychologique est évident… » Sans parler de l’efficacité marketing d’un tel argument. On comprend dès lors que les emplois libres ou indifférenciés des termes « mégapixels » et « HD » se soient multipliés.

Il est intéressant de noter que le format HD 720p n’est pas à proprement du mégapixel, puisqu’il propose une résolution légèrement inférieure à 1 million de pixels : 1280×720, soit 0,92 mégapixel. On considère néanmoins que c’est un format mégapixel. Pour simplifier encore les choses, à résolution équivalente, un format d’image peut être HD… ou non : si le format Full HD (1080×1920 pixels) équivaut à 2 mégapixels, tous les formats 2 mégapixels ne sont pas forcément HD… Quelle est la différence ? Les formats HD font, en réalité, l’objet d’une norme (lire l’encadré).
« La HD correspond à des formats d’image normés, provenant du monde de la télévision et de la vidéo grand public, résume Nicolas Baumann. L’appellation “HD” désigne donc une technologie maîtrisée aussi bien au niveau de la prise d’images, que de l’encodage, du transport, de l’enregistrement et de l’affichage, avec un résultat fluide. » « À l’origine, enchaîne Xavier Sanchez, l’objectif de cette normalisation consistait à pouvoir reproduire des formats d’image sans avoir à les retailler ou les déformer. En effet, une télévision étant dépourvue de processeur, elle ne peut effectuer ces opérations. En HD, les formats produisent des images en 16/9 quoi qu’il arrive. On doit être capable d’afficher du 16/9, en tout cas. Les formats mégapixels, en revanche, n’indiquent qu’un rapport hauteur/largeur avec une densité de pixels donnée, sans forcément préciser le format global de l’image. Si bien que l’on peut se retrouver avec toutes sortes de formats. »
Dans leur diversité, les formats mégapixels offrent donc des quantités de possibilités d’affichage. Développés à l’origine pour la photographie, ils correspondent le plus souvent à des affichages au format 4/3. Ceci étant, en l’absence de normes, rien ne l’impose et tous les formats sont envisageables. En témoignent, par exemple, les formats extralarges des caméras panoramiques : le capteur 3,1 mégapixels d’un dôme hémisphérique peut produire des images plein format de 2048 x 1536 pixels, soit un format 4/3. Mais aussi des images panoramiques au format 1280 x 480 pixels, soit un format 8/3. « Les résolutions et les formats peuvent s’adapter aux besoins des utilisateurs, indique Olivier Maillard (Samsung Techwin). Dans un casino, par exemple, la totalité de l’image peut être utilisée à des besoins de surveillance. Dans ce cas, le format 4/3 s’y prête bien. En fonction des besoins, nous pouvons ainsi fournir une image 3 mégapixels au format 4/3. Ou au format 16/9, si un utilisateur souhaite bénéficier d’un champ plus large, sans surveiller le bas et le haut de l’image. »

HD : les attributs d’un standard
La définition et la normalisation des formats HD ont été menées par la Society of Motion Picture and Television Engineers (SMPTE), organisme responsable de l’établissement des standards en télévision. Deux normes industrielles ont été définies en tant que standards internationaux pour l’industrie de la télévision et de la vidéo : SMPTE 296M et SMPTE 274M. Elles correspondent respectivement aux deux formats HD utilisés en vidédosurveillance : le 720p ou HD Ready (1280×720 pixels, soit une résolution de 921 600 pixels) et le 1080p (« p » pour progressive scan) ou Full HD (1920×1080 pixels, soit une résolution de 2 073 600 pixels) pour un affichage en 16/9. Selon les caractéristiques de la norme, toute caméra réseau conforme doit donc pouvoir offrir une résolution et une fréquence d’image élevées ainsi qu’une fidélité optimale des couleurs.
Par ailleurs, le standard HDTV a conduit à équiper les caméras HD de capteurs progressifs. La différence est de taille : la vidéo analogique traditionnelle enregistre des trames entrelacées, soit le résultat de deux champs capturés avec un décalage temporel. D’où l’effet de « peigne » constaté lors d’un arrêt sur image. La vidéo Progressive Scan est le résultat de la capture d’une trame en une fois et produit des images beaucoup plus nettes, plus adaptées à l’affichage sur des moniteurs de type PC.

HD = garantie de qualité ?

C’est un fait : l’intérêt pour l’image haute résolution est fortement influencé par l’évolution des technologies grand public. Au vu des performances affichées par le capteur X mégapixels d’un appareil photo numérique, il est bien tentant d’imaginer qu’une résolution élevée produit forcément une « belle image ». On en vient à considérer la haute résolution comme la garantie d’une bonne qualité d’image. Qu’en est-il vraiment ? « L’étiquette “HD” ne garantira jamais une qualité d’image, indique Xavier Sanchez, mais simplement une constance dans le traitement et l’affichage.
Autrement dit, la HD garantit que le résultat sera conforme à la source. Le standard défini par la Society of Motion Picture and Television Engineers (SMPTE) comprend un volet résolution (format d’affichage), mais aussi un volet restitution des couleurs. Bien entendu, ces conditions sont garanties si tous les éléments de la chaîne respectent la norme. Ce qui, il faut bien l’avouer, est rarement le cas : il suffit d’utiliser un câble VGA entre une carte et un écran Full HD pour que l’installation ne corresponde plus au standard. » Produire une signal HD est donc une chose. L’acheminer avec les moyens adéquats en est une autre.
De plus, enchérit Katharina Geutebrück (Geutebrück) : « Il est non seulement nécessaire de prendre en compte une technologie de prise de vue, de la contrôler, mais aussi de maîtriser les paramètres de l’enregistreur. Toute la chaîne des équipements compte. A ce jour, peu d’utilisateurs l’ont compris. Il faut remarquer que la majorité des caméras mégapixels du marché sont produites par des fabricants qui ne construisent que ce type d’équipement. Or, plus qu’avant, la vidéosurveillance est une affaire de système. Il est nécessaire de maîtriser toute la chaîne technologique. » L’argument HD ne suffit donc pas, loin de là, à vanter les qualités d’une installation de vidéosurveillance. Comme l’indique Erwan Poulain (Indigovision) : « Il est aujourd’hui bien pratique de focaliser le discours sur le nombre de pixels. Il faudrait s’attarder également sur les conditions d’exploitation de la HD, c’est-à-dire l’ensemble des fonctionnalités nécessaires pour bénéficier à 100 % de ses performances : bande passante, compression, exploitation logicielle, stockage. Et que dire d’une caméra HD dont l’optique est de mauvaise qualité ? »

Conditions et limites de l’image haute résolution

L’exploitation de la haute résolution est donc soumise à conditions et réclame le déploiement d’une architecture particulière, dont il ne faut pas oublier que ses applications seront, elles aussi, particulières. Pour des raisons évidentes de coût, le « tout HD partout » n’est pas à l’ordre du jour. La technologie est de plus en plus abordable, mais les conditions de son exploitation représentent un investissement coûteux. Et puis, faut-il recommander la haute résolution pour tous les usages ? « On revient souvent au constat suivant, commente Xavier Sanchez : le format HD n’est pas nécessaire dans une majorité des applications de vidéosurveillance. C’est pourquoi la haute résolution doit supposer des applications spécifiques, ne serait-ce seulement parce que son exploitation demande une architecture spécifique. Ne pas oublier que la HD consomme plus de bande passante et de capacités de traitement. De plus, dans quelles proportions les besoins en vidéosurveillance justifient-ils l’utilisation de la HD, à savoir des capacités d’agrandissement ? »
Ajoutons à cela les contraintes inhérentes aux capteurs mégapixels, à commencer par leur sensibilité plus faible. En effet, plus un capteur comporte de pixels, plus les besoins en lumière sont importants. D’où les limites opposées à un des principaux arguments de la haute résolution : la possibilité de remplacer plusieurs caméras standard par une caméra mégapixel. Katharina Geutebrück : « La sensibilité des capteurs haute résolution est un sujet qui pose problème : si une caméra 10 mégapixels est censée assumer le rôle de dix caméras en résolution standard, la surface de son capteur n’équivaut pas à dix fois la surface d’un capteur standard. Dans ce cas, comment obtenir une image satisfaisante dans les conditions qui sont celles de la vidéosurveillance ? » L’utilisation de capteurs CMOS de dernière génération, l’usage de technologies pour la gestion des contrastes comme le WDR (Wide Dynamic Range) permettent aujourd’hui d’obtenir des résultats satisfaisants. Tout comme les éclairages infrarouges intégrés en situation de faible luminosité.

Il reste que la prise de vue haute résolution a ses exigences. « Les conditions d’usage des caméras haute résolution restent plus difficiles à déterminer que pour des caméras classiques, résume Xavier Sanchez. Cet état de fait exige couramment de réaliser des études un peu plus poussées en amont, de manière à bien déterminer les conditions d’exploitation, particulièrement au niveau de l’éclairage et des variations d’éclairage. » Autre contrainte : le poids des images. Malgré les résultats de technologies de compression comme le H.264, l’image mégapixel nécessite une bande passante performante, ainsi que des capacités de traitement et de stockage importantes.
Et cette contrainte a un coût. A chaque fabricant sa stratégie : « Il faut toujours considérer que le choix de la HD a des conséquences sur le réseau, rappelle Jean-Guillaume Simon (Samsung Techwin). Un flux 3 mégapixels peut atteindre des débits de l’ordre de 7 à 10 Mb/s, soit une valeur relativement importante. C’est sur ce type de problématique que nous organisons notre réflexion. A savoir : comment diminuer l’impact réseau ? Dans cet objectif, nous préférons exploiter des images plus légères, de l’ordre de 2 mégapixels (Full HD), au format 16/9. De cette manière, les zones d’intérêt d’une scène sont conservées. Ensuite, nous utilisons des technologies de compression comme Smart Codec. En conséquence, la note est moins lourde pour l’utilisateur : en réduisant le débit, on augmente les capacités de stockage, tout en conservant les avantages de la haute résolution. »

3 mégapixels et au-delà : pour quoi faire ?

Au-delà de 3 millions de pixels, quelles peuvent être les applications de la haute résolution ? On rentre là dans le domaine du spécifique, où les besoins de détails dans l’image sont particulièrement présents : la lecture de plaques d’immatriculation longue distance, par exemple. Dans ce cadre, les usages poussent à éloigner le point de capture pour le sécuriser, tout en conservant un niveau de détails important pour effectuer une analyse a posteriori. En conséquence, on sollicite des capteurs de résolutions supérieures. Le champ d’application de la haute résolution peut également dépasser le cadre strict de la sécurité. Comme l’indique Katharina Geutebrück : « L’industrie sollicite notamment les caméras très haute résolution pour la surveillance de process de production. Ce sont des situations où tous les paramètres sont suffisamment maîtrisés pour permettre l’exploitation d’une caméra très haute résolution dans des conditions d’éclairage optimales. »
Les résolutions élevées permettent également d’associer performances de zoom dans l’image et surveillance de l’ensemble d’une scène étendue. Le système Panomera, développé par Dallmeier, dispose d’un argument fort pour l’exploitation de la très haute résolution dans la surveillance de scènes complexes. En effet, à la différence d’un dôme PTZ classique, Panomera permet de zoomer dans l’image, tout en garantissant l’enregistrement de l’ensemble d’une scène étendue (un stade, un parking, une zone de stockage). Le concept : fournir une image très haute résolution en combinant les images issues de plusieurs capteurs Full HD, chaque capteur étant équipé d’un zoom optique indépendant. En lieu et place d’un flux mégapixel très lourd, ce système multicapteur produit plusieurs flux HD (jusqu’à 30 fps), permettant ainsi un traitement fluide au niveau de l’enregistrement. Un traitement logiciel recompose les images en une seule image très haute résolution (51 mégapixels en résolution maximale), offrant largement de quoi effectuer des zooms importants dans l’image.

Chez Axis, la caméra 5 mégapixels P1347 permet de réduire le nombre de caméras pour la surveillance d’une scène donnée, tout en garantissant une exploitation fluide de la bande passante. L’Axis P1347 permet de diviser le format mégapixel natif en plusieurs images de moindre résolution. Les images fournies par la P1347 peuvent ainsi être divisées en huit vignettes différentes sur des zones choisies de l’image globale et considérées comme huit flux discriminés. Au niveau du poste, l’opérateur se retrouve à traiter huit caméras de résolution inférieure, à ceci près qu’il n’y a en réalité qu’une caméra haute résolution attachée à la surveillance d’une scène. Ce procédé avantageux revient à utiliser un seul capteur, une seule transmission et donc une seule fois la bande passante globale, sans multiplier les flux sur le réseau.
De son côté, Samsung Techwin, avec la technologie de compression Smart Codec, offre une solution performante pour contrer la problématique du poids des images mégapixels. Cette technologie permet, à partir d’une image 3 mégapixels, de disposer d’un champ de vision très large, dans lequel il est possible de définir jusqu’à cinq zones d’intérêt. Ces zones définies bénéficient d’une compression de haute qualité, quitte à dégrader le reste de l’image. Des zones telles que les visages, les portes, les fenêtres peuvent être transmises ou enregistrées en pleine résolution, tandis que les autres zones sont traitées en résolution réduite. En minimisant la taille des fichiers, Smart Codec permet de contrôler la bande passante avec davantage d’efficacité.

La HD sans IP, c’est possible ?
Faire transiter des flux HD via un câble coaxial, c’est ce que proposent les solutions dites « HD-CCTV ». Dans le monde de l’analogique, l’idée semble avoir le vent en poupe. La HD-CCTV permettrait donc de proposer de la HD à moindre coût. Autrement dit, en conservant le câblage d’une installation analogique traditionnelle, sans avoir à passer par un réseau IP. Oui, mais… Pour faire de cette solution une réalité, il faut réunir des conditions particulières. « On considère traditionnellement qu’il n’est pas possible de faire passer de la HD sur des câbles analogiques, indique Erwan Poulain. Et tout à coup, la HD-CCTV nous prouve le contraire ! En réalité, en lisant entre les lignes, on réalise qu’une telle technologie nécessite des câbles analogiques spécifiques. Qui plus est, les distances autorisées sont loin d’atteindre les câblages autorisés en analogique standard. »
En effet, les solutions HD-CCTV utilisent la technologie de transmission HD-SDI (Serial Digital Interface), protocole de transfert standard permettant la diffusion d’un signal numérique via un câble coaxial (de type BNC 75 Ohm). De plus, les caméras HD-CCTV doivent être capables de fournir un signal HD analogique. Elles sont plutôt rares (actuellement, la plupart des caméras HD du marché ne traitent que des signaux numériques de bout en bout). Davantage qu’une véritable solution, la HD-CCTV permet aux installateurs ne possédant pas de compétences réseau de proposer de la HD à leurs clients.

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