Gérer les risques
Aujourd'hui et demain

Sûreté et sécurité

Euro 2016 : après les attentats de Bruxelles, l’État prend la problématique de la sécurité à bras-le-corps

Ne pas céder un pouce de terrain aux terroristes, c'est ce que l’État français compte bien revendiquer en maintenant coûte que coûte l'Euro 2016 qui se déroulera du 10 juin au 10 juillet. Dans une douzaine de villes françaises (Paris, Saint-Denis, Lyon, Bordeaux, Toulouse, Marseille, Saint-Etienne, Lille, Lens et Nice), les dispositifs de sécurité seront maintenus aux plus haut niveau. Notamment en ce qui concerne les ''fans zones'' dans les grandes villes françaises.

« La sécurité de l’Euro 2016 atteindra un niveau sans précédent », a rappelé mardi dernier Bernard Cazeneuve, ministre de l’Intérieur durant un comité de pilotage qui s’est déroulé Place Beauvau, quelques heures seulement après les attentats qui ont endeuillé la Belgique. Prévu de longue date, ce comité a rassemblé, entre autres, Patrick Kanner, ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports mais aussi les élus des villes hôtes (Paris, Saint-Denis, Lyon, Bordeaux, Toulouse, Marseille, Saint-Etienne, Lille, Lens et Nice) et les préfets des départements concernés ainsi qu’Alain Juppé, maire de Bordeaux et Président du club des sites hôtes de l’Euro 2016. On s’en doute, la réunion a débuté dans une atmosphère endeuillée par les attaques terroristes de Bruxelles qui « nous rappellent tragiquement le haut niveau de menace auquel nous sommes confrontés », a déclaré en préambule Bernard Cazeneuve.
Si la question a effectivement été posée d’annuler cet événement qui devrait rassembler des millions de spectateurs entre le 10 juin et le 10 juillet dans une dizaine de villes françaises, le gouvernement a néanmoins choisi de maintenir coûte que coûte l’Euro 2016. « La position qui est la nôtre est de ne pas céder au terrorisme, a martelé le ministre de l’Intérieur. Cette manifestation [aura] lieu comme la COP 21 a pu avoir lieu [quelques jours après les attentats du 13 novembre à Paris et Saint-Denis qui ont fait 130 morts et 300 blessés, NDLR]. »
D’ailleurs, le dispositif sécuritaire prévu autour des stades et des fans-zones par l’Etat et l’organisateur, en l’occurrence l’Union européenne des associations de football (UEFA), avait à l’origine été conçu à son plus haut niveau et ne sera donc en rien modifié. « On ne peut pas rehausser en permanence ce qui est déjà a un niveau très élevé depuis janvier 2015 mais on peut conforter le dispositif », tempère néanmoins Bernard Cazeneuve. Entre ne rien céder aux terroristes et maintenir un niveau de sécurité sans précédent, l’Etat se trouve pris dans un cruel dilemme. Ce sont surtout les fans-zones qui posent problème. Ce dispositif consiste à installer un écran géant sur la plus grande place de chaque grande ville française afin de retransmettre les matchs aux supporteurs qui n’ayant pu s’acheter de billet, se rassemblent tout de même à cette occasion. Avec un afflux situé entre 10.000 et 100.000 personnes pour chaque ville hôte !
Parmi les dispositifs qui ont été mis en place spécialement pour les fans-zones, citons les palpations systématiques, la détection éventuelle d’objets métalliques, le recours aux services de déminage et l’installation de la vidéosurveillance (financée par l’Etat à hauteur de 80% soit 2 millions d’euros)… Apparemment, la liste de mesures est longue. « En revanche, il faut avoir la souplesse qui permettrait, le cas échéant, de reconsidérer nos positions sur telle ou telle fan-zone », soupèse Bernard Cazeneuve. D’autant que cette décision de maintenir les fans-zones a fait grincer quelques dents… Notamment en ce qui concerne le collège du Conseil national des activités privées de sécurité (Cnaps). Placé sous la tutelle du ministère de l’Intérieur, cet organe de contrôle et de régulation de la sécurité privée avait, le 19 novembre, recommandé « fermement la suppression des fans-zones dès lors qu’elles ne pourraient pas être prises en charge directement par les organisateurs avec leurs moyens propres. »
Pour le président du collège du Cnaps, Alain Bauer, ce ne sont pas forcément les dispositifs de sécurité qui posent problème mais le manque cruel d’effectif d’agents de sécurité : « La difficulté relève de la pluralité des interlocuteurs, du fait que beaucoup de ces espaces sont gérés au niveau local. On a l’impression qu’il y a comme un espoir secret, comme si, en raison précisément de cette gestion au niveau local, il y aura toujours une société qui voudra bien pourvoir à la fourniture des effectifs. Hier [jeudi 19 novembre, NDLR] au Cnaps, la communauté professionnelle, syndicats professionnels, grandes, moyennes et petites entreprises, a dit : « Ces gens n’existent pas », confiait-il à notre confrère, le quotidien d’information en ligne pour les collectivité territoriales Localtis, au lendemain des attentats du 13 novembre.
Quoi qu’il en soit, l’Etat compte bien prendre toutes ses responsabilités face aux villes hôtes : la sécurisation des fans-zones, en accord avec le préfet, coûtera 17 millions d’euros au total, selon Alain Juppé. De plus, le président du Club des villes hôtes, à qui l’UEFA avait promis 3 millions avant les événements de novembre, a demandé à l’instance européenne une rallonge d’un million. Demande qui sera examinée lors du prochain comité de pilotage, fin avril, selon l’AFP.
Enfin, partout sur le territoire, l’Etat mobilisera des policiers, des gendarmes, des sapeurs pompiers, des secouristes, des urgentistes, dont le nombre sera communiqué quelques semaines avant la manifestation. « Plus de 50 exercices de sécurité auront lieu d’ici le coup d’envoi de l’Euro le 10 juin. Ces exercices visent à tester les chaînes d’alerte et de secours en cas d’événement sécuritaire. Des dizaines de scénarios ont ainsi été imaginés », a ajouté Bernard Cazeneuve. Et déjà, un scénario catastrophe a été simulé jeudi 17 mars à l’Ecole de police de Nîmes dans le Gard.

Ségolène Kahn

Commentez

Participez à la discussion


The reCAPTCHA verification period has expired. Please reload the page.