Gérer les risques
Aujourd'hui et demain

Sûreté et sécurité

Dominique Legrand (AN2V) : « Nos sociétés auront besoin d’outils pour s’adapter à l’impensable »

Interview du président de l’association nationale de la vidéoprotection (AN2V). Dominique Legrand explique comment les technologies de la sécurité devront être agiles, aisément reconfigurables et reprogrammables. Objectif : sauver des vies en cas de sidération tout en contribuant à la Smart & Safe City.

dominique-legrand-est-president-de-l-association-nationale-de-la-videoprotection-(an2v).

Dominique Legrand est président de l’association nationale de la vidéoprotection (AN2V). © Agence TCA

En quoi la crise sanitaire a-t-elle impacté l’innovation en vidéosurveillance et vidéoprotection ?

En réalité, cette crise nous apporte plein d’enseignements. Nous avons été nombreux à chercher comment donner du sens à tout ce qui nous arrivait. Les mots ‘‘distanciel’’ et ‘‘présentiel’’ ont fait leur apparition dans le vocabulaire en 2020. Mais, dans le sillage des attentats de 2015 et de la crise sanitaire, je rajoute le terme de ‘‘sidération’’. En effet, nos sociétés vont devoir s’adapter à toutes sortes de situation de sidération. Autrement dit, l’impensable peut toujours se produire. Et nos sociétés auront besoin d’outils pour s’adapter à l’impensable.

Comment ces réflexions philosophiques se traduisent-elles dans l’innovation et la technologie ?

Il y a un an, qui aurait trouvé pertinent que la reconnaissance faciale détecte le port du masque chirurgical ? Aujourd’hui, il est parfois indispensable de voir qui ne le porte pas dans une foule. En quelques mois, les fournisseurs ont dû adapter leurs technologies à de nouvelles applications. Morale de l’histoire : la technologie de demain devra être agile, aisément reconfigurable et reprogrammable. Et apporter le maximum de services nouveaux en réaction à une nouvelle sidération. Caméras, enregistreurs, serveurs, contrôle d’accès, IoT, drones, caméras-piétons…. Toutes les technologies qui augmentent l’homme devront être agiles.

Comment ces technologies vont-elles se comporter dans la Smart & Safe City ?

Celle-ci se calque sur la pyramide de Maslow qui hiérarchise les besoins et propose une théorie de la motivation. La première couche porte sur les besoins physiologiques : faim, soif, sexualité, respiration, sommeil. La seconde, sur les besoins de sécurité (environnement stable et prévisible). Au sommet de la pyramide, la Smart & Safe City nous fait trouver une place de parking en moins de trois minutes. Dans les deux premières couches, les technologies la Smart & Safe City doivent s’adapter instantanément pour sauver des vies. Et ce, face à des événements sidérants comme les inondations, séismes, incendies, attentats, pandémies…

Ces tendances se retrouvent-elles dans les travaux du Comité stratégique de filière (CSF) des industries de sécurité (IS) ?

Oui bien sûr ! Avec la crise sanitaire, l’usage de la visioconférence s’est banalisé. Aujourd’hui, il est courant de se réunir trois ou quatre fois par jour sur Zoom ou Teams. Nous avons ainsi eu une vingtaine de réunions avec le CSF-IS. Nous avons tout particulièrement avancé sur le projet n°4 (parmi cinq), ‘‘Territoires de confiance’’ avec Thales. Parmi les cinq axes de travail, nous nous sommes attachés au premier qui porte sur les nouveaux besoins des collectivités. Nous avons ainsi travaillé avec une trentaine de collectivités territoriales et autant de sociétés qui fournissent des solutions. A partir de là, nous avons créé dix sous-groupes de travail. L’un d’eux phosphore sur les services à apporter aux citoyens. Un autre sur comment réagir face à une cyberattaque. Un autre encore étudie comment partager en toute sécurité un flux d’images de vidéosurveillance pour des usages serviciels.

Travaillez-vous sur l’économie de la data ?

Oui. Entre autres, nous réfléchissons à développer l’usage des capteurs sonores en complément des caméras mais il faut aussi des capteurs de pollution, de rayonnement électromagnétique… La Smart & Safe City va générer de plus en plus de données. Un groupe de travail réfléchit à la façon de partager et de monétiser les données collectées par la ville.

Quel est le rôle des collectivités ?

Il est essentiel. Nous avons laissé les collectivités s’exprimer en premier. Cela a abouti ni plus ni moins à de l’expression de leurs besoins. En clair, cela structure le marché. Du coup, les fournisseurs vont soit apporter le produit qui convient et dont ils disposent. Soit ils vont lancer un programme de R&D pour satisfaire un besoin non couvert. Une chose est sûre : la ville de demain est aussi la campagne de demain. On ne parle plus seulement de la ville intelligente et sûre mais des Territoires intelligents et sûrs. Par ailleurs, nous appliquons la même méthodologie à l’axe n°4 sur les sites sensibles. À cet égard, nous venons d’en constituer les dix groupes de travail.

Erick Haehnsen

Commentez

Participez à la discussion


The reCAPTCHA verification period has expired. Please reload the page.