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Santé et qualité de vie au travail

L'Anses alerte les pompiers sur l'exposition au risque chimique

Selon l’agence de sécurité sanitaire, les soldats du feu sont exposés à un véritable cocktail de substances chimiques qui résultent des fumées de combustion des matériaux de bâtiment.

Intervention de pompiers sur une citerne de gaz en feu.

Intervention de pompiers sur une citerne de gaz en feu. © INRS

Avec la prolifération des plastiques et des substances chimiques dans les matériaux des bâtiments, les émanations des fumées de combustion en cas d’incendie sont de plus en plus complexes et surtout toxiques. De fait, la santé des pompiers représente un motif d’inquiétude croissant pour l’Agence nationale de sécurité sanitaire et alimentaire (Anses) qui vient de publier un rapport inédit de 154 pages dans lequel elle souhaite tirer la sonnette d’alarme. Et les résultats tombent à pic : le 16 octobre, notre confrère Le Monde dévoilait des bilans sanguins préoccupants pour les pompiers intervenus lors de l’incendie de l’usine Lubrizol de Rouen qui ont été exposés aux fumées de 9 514 tonnes de produits, dont environ 7 000 tonnes de substances cancérogènes, toxiques ou irritantes.

Cocktail de substances chimiques

Outre les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), les substances qui émanent des fumées sont en réalité bien plus nombreuses que ce que l’on pourrait croire. C’est là tout le postulat de l’agence qui dénonce « un cocktail de substances chimiques » auquel les soldats du feu sont exposés,  par inhalation et par voie cutanée. 

Les isolants dans le collimateur

Le nombre de ces substances va croissant avec l’augmentation de l’utilisation de matériaux synthétiques et de plastiques pour la construction des bâtiments. En particulier les fibres biosourcées pour l’isolation des bâtiments qui recèlent des substances retardatrices de flammes dont le risque chimique est encore mal évalué. 

14 COV

Acroléine, monoxyde de carbone, formaldéhyde, glutaraldéhyde, chlorure d’hydrogène, cyanure d’hydrogène, dioxyde d’azote… en tout, le rapport cite 14 composés organiques volatils (COV) présents dans les combustions de fumées toxiques, auxquelles s’ajoutent divers métaux lourds tels que le cadmium, le chrome et le plomb.

Risque de cancer

Si le Centre international de recherche sur le cancer (Circ) classe l’exposition professionnelle des sapeurs-pompiers 2B, c’est-à-dire « Possiblement cancérigène pour l’Homme en raison de preuves limitées », il reconnaît, dans un rapport réalisé en 2010, « des risques accrus de développer certains cancers ». Plus récemment, l’Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et sécurité au travail (RSST) a publié une étude dans laquelle il fait le lien entre la profession et le développement du mésothéliome, un cancer particulièrement virulent qui affecte le revêtement des poumons, de la cavité abdominale ou l’enveloppe du cœur. L’institut évoque également « les cancers du poumon, de la vessie, du cerveau, du côlon/rectum, de la tête et du cou, des reins, de l’œsophage, de la peau et de l’intestin grêle, de même qu’avec le lymphome non hodgkinien, la leucémie et le myélome multiple. »

De nombreux effets non-cancérogènes

Outre le risque de cancers, l’Anses cite de nombreuses autres affections liées à l’exposition aux substances chimiques parmi lesquelles l’asphyxie et la pneumonie chimique, les irritations oculaires, les maux de tête, les étourdissements, les nausées, les troubles respiratoires, les troubles cutanés, les tumeurs non cancéreuses, les atteintes du système immunitaire, les effets sur la fertilité et les effets cardiovasculaires. « L’étendue des effets sanitaires éventuels, qu’ils soient locaux ou systémiques, qu’ils soient consécutifs à une exposition à court terme ou à long terme à des substances chimiques, pourrait s’avérer importante au vu de la multitude des activités potentiellement exposantes et des nombreuses substances chimiques présentes et pas toujours identifiées ». Et c’est sans compter l’exposition à l’amiante…

Ségolène Kan

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