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Santé et qualité de vie au travail

Santé au travail : un cadre vit 6,4 ans de plus qu’un ouvrier

Une étude de la Mutualité française révèle des chiffres particulièrement préoccupants sur l’état de santé globale des salariés, dans un pays où les inégalités demeurent profondes entre les différents métiers.

Entre troubles musculosquelettiques (TMS), stress et maladies professionnelles, les Français sont au bord du burnout. Dans un contexte particulièrement tendu où le gouvernement repousse le départ à la retraite à 64 ans, une étude de la Mutualité française dresse un tableau préoccupant de la santé des Français au travail. Taux de maladies professionnelles, inégalités profondes sur l’espérance de vie… Cet observatoire de « la santé au travail, kit pratique » passe au crible l’ensemble des critères de la santé au travail.  

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Selon la Mutualité Française, le BTP représente un des secteurs les plus accidentogènes. © Pop & Zebra / Unsplash

2 décès par jour

Qu’il s’agisse de stress, de fatigue, ou de douleurs physiques, 91% des actifs indiquent avoir connu des difficultés de santé au travail. Il faut dire qu’en France, les maladies professionnelles ont explosé ces deux dernières décennies. Positionnant l’Hexagone parmi les pays européens enregistrant les chiffres les plus élevés sur les accidents au travail. En 2019, on comptabilise 733 accidents du travail mortels soit deux décès par jour. Et c‘est sans compter les accidents de trajet entre le domicile et le lieu de travail (283 décès) et les maladies professionnelles (175 décès). 

3,3 % du PIB européen par an

En conséquence, environ 5 % à 10 % des travailleurs sont exposés à la désinsertion professionnelle en raison de leur état de santé ou d’un handicap. Avec plus de 40 % de salariés en arrêt maladie au moins une fois par an, l’absentéisme lié à des accidents et maladies liés au travail coûte à l’économie de l’Union européenne plus de 3,3 % du PIB par an.

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2,8 millions de travailleurs indépendants et chefs d’entreprises sont sans suivi en santé au travail. © National Cancer Institute / Unsplash

Une espérance de vie inégale

Autre triste constat, l’espérance de vie diffère considérablement en fonction du métier exercé. Ainsi, un cadre bénéficie d’une espérance de vie supérieure de 6,4 ans par rapport à un ouvrier. Chez ces derniers, la fréquence d’accident du travail mortel est presque cinq fois plus élevée que chez les cadres. Les secteurs d’activité les plus accidentogènes sont la construction, le commerce, les transports, l’hébergement, la restauration, le secteur de l’intérim et le médico-social.

Des déserts médicaux

Or il existe peu de solutions pour y remédier puisque la France assiste à une crise de la démographie médical. Pour plus de la moitié des médecins, l’âge dépasse 65 ans. Ce qui fait de la « médecine du travail » la quatrième spécialité médicale la plus âgée de France. En conséquence, 61 % des salariés du secteur privé n’ont pas bénéficié d’une visite avec un service de médecine du travail au cours de l’année. Pis encore, 6 % des salariés n’en ont jamais bénéficié. Quant aux travailleurs indépendants et chefs d’entreprise, ils représentent l’angle mort de la santé au travail. Ils sont donc 2,8 millions sans suivi en santé au travail.

Des indemnités inégales

Cependant, en cas de décès, d’incapacité ou d’invalidité, les choses se compliquent. En effet, l’étude révèle des inégalités profondes en ce qui concerne la couverture en matière de prévoyance. Concrètement, les contrats de prévoyance proposés par les organismes d’assurance complémentaire ont pour but le versement d’indemnités complémentaires à celles de la Sécurité sociale en cas d’arrêt de travail, d’incapacité, d’invalidité ou de décès. Problème, ils ne protègent pas tous les travailleurs de la même manière. Ainsi les salariés des grandes entreprises sont-ils mieux couverts que les fonctionnaires et les indépendants. De même, les cadres sont mieux protégés que les non-cadres. 

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Avec le vieillissement de la population, un actif sur 4 sera proche aidant en 2030. © National Cancer Institute / Unsplash

Une mobilisation insuffisante des entreprises

Dans ce contexte, les entreprises ne semblent pas suffisamment impliquées pour améliorer les conditions de travail. Un Français sur deux considère que les entreprises ne sont pas mobilisées sur le sujet de la prévention en santé au travail. De même, seuls 43 % des dirigeants indiquent avoir mis en place au sein de leur entreprise une politique globale de prévention.

Une population vieillissante

Enfin, l’étude rappelle que le vieillissement de la population associé au développement des pathologies chroniques entraîne une augmentation de la morbidité et du nombre d’arrêts de travail. Ainsi la durée moyenne des arrêts s’avère-t-elle trois fois plus longue chez les seniors de plus de 60 ans que chez les jeunes de moins de 20 ans. De plus, en 2030, un actif sur quatre sera proche aidant. Un rôle qui représente une responsabilité importante. Et c’est sans compter la difficulté de concilier vie professionnelle et vie personnelle, l’isolement et la charge mentale. Une conséquence à prendre en compte dans le maintien au travail des seniors dans la vie active.

Ségolène Kahn

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