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Risques industriels et environnementaux

Particules fines dans l'air en France : il est temps de tirer la sonnette d'alarme

48.000 décès en France chaque année, une réduction de l'espérance de vie de 9 mois à 2 ans selon qu'on habite à la campagne (non épargnée) ou dans une grande ville... La pollution atmosphérique aux particules de moins de 2,5 micromètres est la troisième cause de mortalité en France.

Quel est l’impact des niveaux de la pollution de l’air sur la mortalité en France ? Ces méfaits se limitent-ils aux grandes villes ? Si la qualité de l’air était améliorée, quel en serait le gain ? Peut-on réduire l’impact de la pollution de l’air sur la santé ? Les pics de pollution sont-ils les plus inquiétants ? Afin de répondre à ces questions, Santé publique France a publié ce 21 juin une étude sur l’impact de la pollution atmosphérique sur la santé en France métropolitaine. Cette agence nationale de santé publique, créée par le décret n°2016-523 du 27 avril 2016, fait partie de la loi de modernisation du système de santé (loi n°2016-41 du 26 janvier 2016). Rattachée au ministère de la Santé, l’agence confirme le poids de cette pollution atmosphérique dans le pays. Elle correspond même à une perte d’espérance de vie pouvant dépasser 2 ans dans les villes les plus exposées.

3 milliards de particules fines absorbées par jour par les Parisiens. Santé publique France a réalisé une  »Évaluation quantitative de l’impact sanitaire » (EQIS) de la pollution atmosphérique qui réactualise la dernière estimation publiée en 2000 dans l’étude européenne CAFE. Laquelle annonçait plus de 40.000 décès liés à la pollution de l’air en France. Dans l’EDIS de 2016, il ressort que les particules fines inférieures à 2,5 micromètres (PM2.5) en lien avec l’activité humaine provoquent 48.000 décès par an. Autre constat, la pollution de l’air n’affecte pas que les grandes villes, même si elle y reste plus importante, les villes moyennes et petites ainsi que les milieux ruraux sont aussi concernés. Plus précisément, dans les zones urbaines de plus de 100.000 habitants les résultats montrent, en moyenne, une perte de 15 mois d’espérance de vie à 30 ans du fait des PM2.5. Dans les zones entre 2.000 et 100.000 habitants, la perte d’espérance de vie est de 10 mois en moyenne contre tout de même 9 mois dans les zones rurales. Inodores, ce ne sont pas moins de 200.000 particules fines qui sont contenues par litre d’air à Paris. Sachant qu’un adulte respire jusqu’à 15.000 litres d’air par jour, un parisien moyen absorbe donc quotidiennement 3 milliards de particules fines qui peuvent se déposer dans les alvéoles pulmonaires. « Le fardeau de la pollution de l’air se situe au troisième rang de la mortalité en France, derrière celui du tabac (78.000 morts) et de l’alcool (49.000 morts) », souligne le Pr François Bourdillon, directeur général de Santé publique France.
Par ailleurs, les travaux de Santé publique France mettent en exergue des bénéfices sanitaires potentiels importants associés à une amélioration de la qualité de l’air. Les résultats montrent que les scénarios les plus ambitieux de baisse des niveaux de pollution conduisent à des bénéfices importants pour la santé. Par exemple, si l’ensemble des communes réussissait à atteindre les niveaux de PM2.5 observés dans les 5% des communes les moins polluées de la même classe d’urbanisation, 34.000 décès pourraient être évités chaque année (gain moyen de 9 mois d’espérance de vie).

Les PM2.5 en cause. Pour réaliser une EQIS de la pollution atmosphérique, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande de s’appuyer sur un couple polluant-effet sanitaire pour lequel les connaissances scientifiques sont suffisantes non seulement pour permettre une quantification de l’impact sanitaire mais aussi pour en asseoir la validité. Or le tandem pollution aux particules fines PM2.5 / mortalité répond justement à cette condition. En outre, les résultats de l’EQIS 2016 se fondent aussi sur des études épidémiologiques françaises et européennes, jugées de nature causale par l’ensemble des épidémiologistes. De fait, les niveaux de pollution par les PM2.5 ont été estimés dans 36.219 communes en France pour les années 2007-2008. Différents scénarios de réduction des niveaux de pollution ont été testés. Les impacts correspondants ont alors été exprimés en nombre de décès évitables et en gain moyen en espérance de vie pour une personne âgée de 30 ans.

Les pics moins dangereux que l’exposition chronique. Par ailleurs, Santé publique France a mené une étude complémentaire dans 17 villes de l’Hexagone, de 2007 à 2010, afin de calculer la part des pics de pollution dans les effets sur la santé. Les résultats confirment les travaux de surveillance menés jusqu’à présent : c’est l’exposition à la pollution, quotidienne et dans la durée qui a l’impact le plus important sur la santé, les pics de pollution ayant un effet marginal.
De nombreuses études dans le monde ont quantifié les bénéfices sanitaires de diverses politiques d’interventions : modification de la composition des carburants, mise en place de péages urbains, pratique du vélo, réduction d’émissions industrielles… La plupart de ces travaux concluent à des améliorations de l’état de santé en termes de mortalité, d’espérance de vie, d’hospitalisations pour asthme, de prévalence des maladies respiratoires et cardiovasculaires, de naissances prématurées… Bref, il faut prendre des mesures d’urgence. A cet égard, le programme de surveillance air et santé de Santé Publique France va être élargi à l’étude des maladies en lien avec la pollution, comme les pathologies cardio-vasculaires, le cancer et l’asthme.

Erick Haehnsen

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