Gérer les risques
Aujourd'hui et demain

Santé et qualité de vie au travail

Les exosquelettes séduisent les entreprises

Les intégrateurs voient les demandes bondir de la part des entreprises et des collectivités. Elles y voient un moyen pour diminuer la pénibilité tout en réduisant les arrêts maladie. Mais pour que ces solutions soient pertinentes, elles doivent s'inscrire dans une démarche de prévention globale.

Exosquelette, la solution pour améliorer les conditions de travail ?

Progressivement mais sûrement, les exosquelettes prennent place dans les ateliers, entrepôts, et autres lieux professionnels. Car non contents de diminuer les risques de blessures des opérateurs, ces dispositifs d’assistance à l’effort s’avèrent rentables pour les business.

« En diminuant la pénibilité, les exosquelettes réduisent de 5 à 10 % les temps d’arrêt et de fatigue des opérateurs ainsi que les arrêt maladie et améliorent aussi la qualité du travail sachant qu’une personne fatiguée fait des erreurs », rapporte Benoit Lyautey, dirigeant et fondateur de Cobo4you, une entreprise spécialisée dans la vente et l’intégration des robots.

Forte demande d’exosquelette en entreprise

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L’exosquelette Every est conçu pour porter des sacs de plus de 25 kilos. © Exofair

Un avis que partagera sûrement Pierre-André Foix, fondateur et président du groupe Fox Innovation Robots.

« Il y a quelques années, les exosquelettes suscitaient de la curiosité, aujourd’hui la question d’un exosquelette se pose de manière systématique dès lors que les entreprises veulent améliorer les postes et les conditions de travail », observe ce dernier qui a déjà distribué depuis 2017, année de la création de l’entreprise, 600 exosquelettes.

Et ce, principalement dans le secteur de l’industrie et de la logistique. « Par rapport à 2019, la demande des entreprises pour des démonstrations et des tests a été multipliée par 10 », estime ce dernier qui a décidé cette année de démocratiser les exosquelettes en créant Exofair, une nouvelle entreprise qui propose une offre plus adaptée auprès des PME, artisans et auto-entrepreneurs.

Basée à Biarritz, cette startup délivre des solutions dont certaines sont disponibles sur étagère, et qui se veulent faciles à mettre en œuvre.

Des offres de 1 000 euros à 4 000 euros pour les exosquelette entreprise

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Plum intéresse les opérateurs qui travaillent avec les mains au-dessus de la tête.© Exofair

Fox Innovation Robots et Exofair proposent différents modèles destinés au port ou à la manutention de charges lourdes, au travail bras élevés au-dessus de la tête ou à hauteur des épaules.

« Il existe de plus en plus d’exosquelettes pour soulager les postures contraignantes comme le travail genou sur le sol ou dos penché », rapporte le dirigeant qui distribue désormais des modèles allant de 1 000 à 4 000 euros (HT).

Parmi lesquelles Plum’, un exosquelette particulièrement léger. Conçu et fabriqué en France par HMT, il a pour effet de soulager les épaules de l’opérateur lorsqu’il travaille les bras en hauteur.

Mate XRT: Ergosquelette à Huit niveaux de réglages

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Le Mate XT est équipé d’une structure en fibre de carbone. © Comau

Le Mate XT est équipé d’une structure en fibre de carbone. © Comau

Les professionnels de l’industrie, la logistique, du BTP ou encore de l’agriculture ne sont pas les seuls secteurs à s’intéresser aux exosquelettes. « C’est aussi le cas des mairies et autres collectivités qui veulent aussi améliorer les conditions de travail de leurs agents d’entretien », témoigne l’ingénieur en mécanique Benoît Lyautey fondateur de la startup Cobot4you.

Laquelle reçoit des demandes d’informations provenant des secteurs public et privé. Créée en 2019 dans la Haute-Saône (70), cette entreprise est spécialisée dans la fourniture et l’intégration d’exosquelettes.

Son catalogue regroupe une demi-douzaine de solutions. Parmi lesquelles, « Mate XT » proposée par l’entreprise italienne Comau.

Cet exosquelette mécanique est destiné aux professionnels de l’industrie ou du BTP qui doivent porter des charge lourdes comme des cartons, objets ou des outils comme une perceuse ou une ponceuse. Le dispositif pèse moins de 3 kilos (2,8 kilos). Point fort, sa capacité à s’adapter à l’utilisateur grâce à ses huit niveaux de réglages.

« Pour chacun des bras, nous pouvons régler une assistance à l’effort allant jusqu’à 6 ou 7 kilos par bras », explique Benoît Lyautey.

Doublement des effectifs de « squelette externe » en 2022

Ce dirigeant fait face à une forte demande. De l’ordre de 200 % à 300 %. Il prévoit pour 2022 de doubler ses effectifs. Actuellement, l’entreprise compte une douzaine de personnes dont une ergonome et trois personnes au bureau d’études en charge d’adapter les produits au besoin des clients.

« En plus de l’intégration, nous formons des référents auxquels nous expliquons comment régler les exosquelettes et quels sont les points de vigilance à avoir et en leur rappelant que l’utilisation d’un exosquelette ne vise pas à augmenter les capacités d’un opérateur mais à l’assister », insiste le dirigeant.

L’occasion d’évoquer les limites à l’utilisation d’un exosquelette. C’est le cas, entre autres, lorsque la charge à soulever est trop élevée par rapport aux prescriptions de l’INRS, ou encore lorsque l’opérateur doit circuler dans un passage trop étroit ou encore lorsqu’il lui faut travailler en position allongée.

Financement consenti par certaines régions

Côté finances, il n’existe pas encore d’aide des Carsat pour acquérir un exosquelette. A la différence de certaines régions comme la Bourgogne, Pays de Loire et Nouvelle Aquitaine qui acceptent d’y apporter leur soutien financier.

Des financements peuvent aussi être demandés au titre du Plan de relance de l’industrie et auprès d’organismes comme la MSA (Mutualité Sociale Agricole) ou la Capeb (Confédération de l’artisanat et des PME du bâtiment).

Enfin, des subventions peuvent être également demandées auprès de l’Agefiph (Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées) ou du FiphFP (Fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique) dans le cadre du maintien à l’emploi de collaborateurs en situation de handicap.

Associer en amont les partenaires dans la lutte contre les troubles musculosquelettiques

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Laurent Kerangueven est un expert de l’INRS en charge de la prévention des TMS.

Pour être pertinente, l’acquisition d’un exosquelette doit s’inscrire dans une démarche globale, rappelle Laurent Kerangueven, ergonome et expert d’assistance conseil à l’INRS (Institut national de recherche et de sécurité).

Cette organisation met à la disposition des entreprises une publication (ED 6315) leur proposant une méthodologie pour les accompagner dans leur projet d’acquisition puis d’intégration d’un exosquelette.

Et ce, en le positionnant dans le cadre d’une démarche globale de prévention des troubles musculosquelettiques (TMS). Laquelle associe en amont les différents partenaires de l’entreprise.

A commencer par les salariés, principaux concernés par l’usage du futur équipement, mais aussi le Service de santé au travail qui va s’assurer que le port d’un exosquelette ne présente pas de contre-indication pour les opérateurs concernés. Doivent notamment être associés le service prévention de l’entreprise, les représentants du personnel.

Sans oublier la société en charge d’aider les clients à identifier leur besoin en matière d’assistance physique et de les orienter vers une solution susceptible d’y répondre. Il peut s’agir d’un spécialiste de l’intégration de telle solution.

Un cahier des charges pour une meilleurs intégration des équipements

  • Conception et définition des tâches
  • financement et acquisition
  • sensibilisation et formation
  • réglage
  • utilisation
  • maintenance

Si la réflexion aboutit à un consensus en faveur de l’ acquisition et la mise en place d’un exosquelette, l’entreprise doit élaborer un cahier des charges. Lequel s’appuie sur une analyse de l’activité afin de caractériser le besoin d’assistance physique.

Il s’agit ici de repérer les zones corporelles à soulager, les contraintes musculaires et les efforts physiques effectués, mais aussi les postures habituellement adoptées, le poids des charges manipulées… Il est également nécessaire de préciser l’environnement dans lequel l’activité est réalisé et l’organisation du travail associée.

En fonction de ces différents éléments, le fournisseur d’exosquelette orientera le choix de l’entreprise vers une technologie qui sera en adéquation avec l’ activité de l’opérateur et ses besoins.

Autre étape importante, la détermination des réglages de l’exosquelette afin d’adapter le niveau d’assistance du système à la nature de la charge manipulée, aux postures de travail adoptées et aux caractéristiques de son utilisateur.

Favoriser l’acceptation par les travailleurs

Comme pour toute nouvelle technologie, il est primordial d’en évaluer l’impact sur la santé des salariés, les risques possibles et de créer les conditions permettant son acceptation par les utilisateurs.

« A tout moment, l’entreprise peut décider de poursuivre, de faire évoluer voire d’abandonner le projet d’intégration de l’exosquelette », indique l’ergonome et expert d’assistance conseil à l’INRS qui publie par ailleurs un guide intitulé: Dix idées reçues sur les exosquelettes qui permet de faire le tri entre croyances et connaissances.

Eliane Kan

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