Gérer les risques
Aujourd'hui et demain

Santé et qualité de vie au travail

La silice serait-elle la nouvelle amiante du BTP ?

Alors que la France ne considère toujours pas cette substance chimique comme cancérigène, une récente directive européenne a classé cancérigènes les procédés dégageant des poussières de silice cristalline. Une avancée qui devrait avoir des répercussions en France dans le courant de l’année 2018. Notamment en ce qui concerne les entreprises dont les salariés sont exposés. Un nouveau scandale sanitaire en perspective ?

Présente dans les ciments, bétons, carrelages ou le granit, la silice représente aujourd’hui un danger de taille pour les ouvriers du BTP qui y sont soumis. Désormais reconnue comme substance cancérigène « avérée » par le Centre international de recherche contre le cancer (Circ), la poussière de silice cristalline alvéolaire fait depuis peu l’objet d’une modification de la réglementation. En effet, la directive 2017/2398 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2017 modifiant la directive 2004/37/CE concernant la protection des travailleurs contre les risques liés à l’exposition à des agents cancérigènes ou mutagènes au travail déclare cancérigènes les « travaux exposant à la poussière de silice cristalline alvéolaire issue de procédés de travail ».

Sauver des centaines de milliers de vies 
Aujourd’hui, l’Union européenne a défini une valeur-limite d’exposition professionnelle (VLEP) de 0,1 mg/m3 sur 8 heures. À terme, elle ambitionne ainsi de « sauver 100.000 vies au cours des 50 prochaines années », selon le conseil de l’UE. Sachant que les poussières de silice cristalline alvéolaire sont classées comme « agent chimique dangereux et non pas cancérigène » en France, c’est une avancée de taille pour la santé des ouvriers car la directive devrait être transposée en France courant 2018.

Les entreprises du BTP, premières cibles de la directive 
Ce changement apporté par la directive devrait avoir des conséquences très concrètes pour les entreprises du BTP dont les salariés sont susceptibles d’être soumis à la poussière de silice. En effet, il s’agira pour ces dernières de développer des techniques non-émissives en ce qui concerne les tâches qui, d’habitude, génèrent de la poussière (gros oeuvre, démolition, travaux sur la chaussée, découpe de matériaux en béton, ponçage de surface bétonnée…). Parmi les procédés existants, les entreprises pourraient se tourner vers des techniques telles que le travail à l’humide ou encore l’aspiration à la source. En matière d’EPI respiratoire, rappelons que les employés doivent être au minimum équipés d’un masque de classe P3.

Dans le BTP, 25 maladies professionnelles « silice » reconnues en 2016 
Les risques liés à l’inhalation quotidienne de poussière de silice devraient être considérés comme un enjeu de santé majeur. En témoignent les chiffres de l’enquête Sumer 2010 : le nombre de salariés exposés aux poussières de silice cristalline alvéolaire s’élève à 295.000 en France. Sachant que, depuis 2016, 25 maladies professionnelles dans le secteur du BTP ont été reconnues comme liées à l’exposition à la silice comme « les affections consécutives à l’inhalation de poussières minérales », et ce, d’après les statistiques de la Caisse nationale d’assurance-maladie des travailleurs salariés.

Risque de silicose ou de cancer du poumon 
D’après l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS), « les poussières dangereuses sont les plus fines qui peuvent atteindre les alvéoles pulmonaires et s’y déposer. […] Les poussières de silice cristalline peuvent induire une irritation des yeux et des voies respiratoires, des bronchites chroniques et une fibrose pulmonaire irréversible nommée silicose. Cette atteinte pulmonaire grave et invalidante n’apparaît en général qu’après plusieurs années d’exposition et son évolution se poursuit même après cessation de l’exposition. » Parmi les affections les plus nocives, on compte les silicoses et les cancers du poumon qui considérés comme des maladies à effets différés, c’est-à-dire qui peuvent se déclarer 20 à 30 ans après l’expositions. Un nouveau scandale sanitaire massif en perspective qui rappelle, par certains aspects, celui de l’amiante.

Ségolène Kahn

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