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Risques industriels et environnementaux

Formation extincteurs | Il ne faut pas faire n’importe quoi

L’efficacité des moyens de lutte contre l’incendie repose sur l’aptitude et le savoir-faire des intervenants. Cette évidence trouve toute son illustration dans la mise en fonction des extincteurs, d’où les diverses formations obligatoires dédiées aux utilisateurs potentiels.

On sait l’importance du temps dans le combat contre le feu, et les moyens qui en découlent : un verre pour la première seconde, un seau pour la première minute, une tonne d’eau soixante secondes plus tard. L’intervention rapide des témoins devenant acteurs de l’incident reste donc primordiale, à condition qu’ils aient à portée de main les outils nécessaires et efficaces. L’invention puis la multiplication des extincteurs ont contribué fortement au succès de ces actions anti-feu, les constructeurs adaptant, en prime, leurs engins à la spécificité des lieux et des produits ou équipements en dépendant. Comme il est détaillé ci-après, il existe plusieurs types ou modèles, souvent identiques dans leur apparence, mais forts différents dans leur contenu, leur mode d’emploi, ou leur qualité à lutter contre tel ou tel type d’incendie. Sur ces différences, viennent se greffer celles des lois et règlements, des obligations et autres décrets, des besoins en la matière variant avec les lieux, leurs vocations, leur classement, leur dangerosité. En fait, au-delà du citoyen lambda acquérant un petit extincteur domestique pour l’accrocher au mur de sa cuisine ou de son garage, rien n’est simple dans l’univers très complexe de la prévention.

La définition de l’extincteur en tant que tel est lapidaire : appareil de lutte contre le feu, capable de projeter ou de répandre une solution appropriée afin d’éteindre un début d’incendie. Sous ce vocable se rangent les engins exclusivement destinés aux sapeurs-pompiers et ceux pour le grand public, ces derniers se scindant eux-mêmes en trois catégories : portatifs, mobiles, fixes. Les agents extincteurs qu’ils contiennent sont l’eau, la mousse, les poudres et le gaz, agissant sur les différents types de feux, en regard des produits, du local, de l’environnement inhérents au lieu qu’ils protègent.

L’extincteur portatif est certainement, par sa destination, sa diffusion populaire, et ses facilités d’emploi, le plus répandu sur la planète. Pesant moins de vingt kilos, il se compose d’un réservoir cylindrique ou sphérique, d’un système et d’un tuyau. Son utilité consiste à la projection sur le feu d’un agent expulsé par pression ou par gaz, le tout s’effectuant le plus rapidement possible, avec le minimum de gestes, et une facilité optimale. Son mode d’emploi est souvent apposé sur son corps, en lettres et en pictogrammes, servants en quelque sortes de formation immédiate à son utilisation. Un code de couleur, relativement peu suivi par ailleurs, doit distinguer son composant : fond jaune de l’étiquette pour la poudre, bleu pour l’eau et la mousse, gris pour le CO2. L’apprentissage de sa mise en œuvre fait partie de la formation sécurité interne à l’entreprise qui l’abrite. Il peut concerner l’ensemble des occupants ou ceux désignés pour la lutte contre l’incendie. Des paramètres simples sont à retenir : les extincteurs pour l’automobile ne sont pas recommandés pour les sinistres domestiques, et les dates de péremption doivent toujours être prises en compte, faute d’efficacité. Une date de révision est souvent précisée, stipulant un appel au SAV de l’installateur.

Les extincteurs mobiles sont identiques aux précédents, mais avec une puissance accrue, grâce au volume contenu (20 à 200 kg). Montés sur un châssis avec roues, ils possèdent un tuyau plus long, parfois une lance pistolet, et leur cartouche de gaz est toujours externe. On les trouve dans les entrepôts, les lieux publics, les aéroports, les stations services et autres sites à la dangerosité ou aux risques variables. Leur emploi demande une certaine habitude, liée à leur maniabilité, leur poids, leurs performances, et leur destination. Ici, on parlera réellement formation, apportée par le fournisseur, dans différents cursus englobant parfois d’autres systèmes d’extinction.

Les extincteurs fixes sont de véritables machineries comprenant une réserve sous pression d’agent extincteur, une tuyauterie pour acheminer ce dernier, un système de déclenchement automatique ou manuel ou les deux. Leur taille est en rapport avec l’installation défendue, qui peut être un local technique (chaudière, compartiment moteur), une armoire électrique, des cuisines, des raffineries, etc.

Lutte contre le feu, mode d’emploi

L’ensemble des fabricants propose des solutions de formation aux utilisateurs potentiels des appareils qu’ils commercialisent. Cet apprentissage concerne aussi bien la mise en œuvre que la maintenance, dont une partie est assurée par le propriétaire ou locataire de l’engin. Il doit, en effet, hors du cadre domestique, assumer une vérification trimestrielle. Elle sera à la fois technique – via un personnel de sécurité habilité –, mais aussi visuelle (accessibilité, mise en place, état apparent), et complètera les visites du fournisseur (une fois par an) et les épreuves des services des mines (de 1 à 5 ans).

Le but de la formation repose sur le constat qu’un extincteur n’est efficace que si l’utilisateur en connaît les caractéristiques et est un familier de sa manipulation. Dans les cas contraires, sa mise en œuvre peut être dangereuse et faire plus de mal que de bien, en amplifiant le risque. D’autre part, la personne concernée doit être capable de faire la différence entre un simple départ de feu facile à combattre avec son outil, et un véritable incendie contre lequel elle ne pourra lutter seule. Sa responsabilité sera en proportion avec ses attributions professionnelles et les tâches qui lui incombent, allant de l’évacuation des locaux à l’appel au centre de secours, en passant par la coupure du gaz, de l’électricité, etc.

Les formateurs et, en règle générale, tous ceux qui revendent, louent ou installent des extincteurs présentent un arsenal conséquent, en rapport avec les besoins de leurs clients. Chaque procédé répond à un risque spécifique, déterminant du choix de l’appareil quant à sa composition et sa puissance, mais aussi, et surtout, quant à son agent extincteur. Pour faire simple, que ce soit eau, poudre ou gaz, tout type de feu a sa réponse, selon le produit qui le provoque ou qui est directement à sa source. L’eau pure restant insuffisante dans son efficacité, un additif émulseur lui est presque toujours adjoint servant à la fois d’isolant de l’air, et modifiant sa tension. Le plus courant est l’A3F ou AFF, redoutable sur les feux de classe A, présentant de nombreux avantages hormis son côté irritant, qui oblige au rinçage des parties corporelles pouvant y être exposées.

L’univers des poudres est un peu plus complexe par sa diversité. Etouffantes, isolantes, elles n’ont cependant aucun pouvoir refroidissant et ont comme inconvénient majeur les dégâts qu’elles provoquent sur l’environnement, mobilier ou autre, au moment de leur emploi. Elles agissent avec rapidité, mais parfois superficiellement, et leur seule utilisation ne suffit pas toujours à l’extinction définitive. Leur classement coïncide avec celui des feux : BC (automobile, industrie), ABC (polyvalentes), D (métaux, industrie, laboratoire). Leur composition très chimique est basée sur l’emploi du bicarbonate de sodium ou potassium (BC) de phosphate d’ammonium ou monoamonique (ABC), de carbonate ou chlorure de sodium et phosphate de calcium (D). On y ajoute du mica, de la terre à foulon, de l’huile de silicone, du stéarate de zinc ou de magnésium, etc.

Quant au gaz, l’interdiction du halon laisse la place au CO2 (dioxyde de carbone), étouffant et refroidissant, stocké sous forme de liquide, diffusé par tromblon. Très efficace sur les feux de liquides classe B mais aussi sur les feux naissants (classe C), on peut l’employer sur les feux solides de classe A. On peut terminer la liste en ajoutant les extincteurs à gaz Argonite, Inergen, HFC-125, Novec 1230, FM 200, principalement utilisés dans les installations fixes protégeant des lieux dans lesquels la poudre ou l’eau seraient inadaptées.

Où se documenter ?

Les organismes de référence accessibles sur le Web donnent le maximum d’informations en matière de formation, de règlements, d’application, etc. L’INRS, le CNPP en sont les premières évidences, mais on s’intéressera également au site Attentionaufeu.fr présentant de multiples solutions de combat contre le feu, ou microsecurite.fr, très complet. On pourra aussi consulter les nombreuses documentations diffusées sur la toile par les fabricants, revendeurs, installateurs de tout origine.

Les former tous

Dans le cadre des diverses lois présentées dans le code du travail, la formation du personnel à la protection incendie, à la prévention ou à l’utilisation du matériel est largement diffusée par de nombreux intervenants. Elle apparaît variable et non uniforme selon les organismes prestataires, allant de quelques heures à plusieurs jours, en rapport avec l’importance du site et sa vocation. Ainsi, à la FPSI, est proposé un cursus d’une demi-journée afin de permettre à l’ensemble du personnel d’une entreprise de manipuler les extincteurs à feu. Au programme, la réglementation, le feu, son triangle et ses classes, l’alarme, la sécurité interne, les différents types d’extincteurs et leurs effets, les distances d’attaque du feu, etc. Au final, une attestation de formation est délivrée aux stagiaires et, bien entendu, à l’employeur qui pourra, au besoin, en faire état. Le SME propose de son côté deux heures sur les lieux de travail (une heure de théorie, une heure de pratique) apportant son propre matériel, à destination de groupes de 5 à 12 personnes. Au menu, la pédagogie, avec vidéoprojecteur et formateur, mais aussi des exercices in situ, extinction pratique du feu, apprentissage et manipulation d’engins et matériels. La formule a son slogan maison : un maximum de personnes, sensibilisées en un minimum de temps, et les moyens sont en rapport avec cette ambition : 10 extincteurs à eau pulvérisée, un pour le matériel électrique, un bec à gaz, des bouteilles de gaz, des films, des mémento de fin de stage.

Chez Eurofeu, présent sur l’ensemble du territoire national avec une quarantaine d’agences ou revendeurs, fabricant, commercial et installateur de ses matériels – plus de 500 000 extincteurs par an de tous types et de toutes tailles, 756 salariés, 70 M€ de CA –, la formation revêt une importance toute particulière. Un département entier lui est consacré, employant une bonne vingtaine de spécialistes, dont une majorité d’anciens pompiers professionnels, chargés d’actions pédagogiques diverses.

« Nous proposons plusieurs cursus, détaille Virginie De Paw, responsable du marketing. Ils sont en rapport avec la taille et les besoins des entreprises, vers lesquelles nous nous déplaçons avec nos moyens propres, le tout en accord avec la réglementation en vigueur, sur appel des dirigeants. Nous établissons un devis, après étude de chaque cas, et proposons des séances adaptées à ces derniers. Elles peuvent être pratiques et – ou – théoriques, variables dans le temps – de quelques heures à plusieurs jours –, s’adresser à l’ensemble des salariés ou seulement à quelques-uns, bref s’intégrer dans la souplesse la plus totale aux spécificités locales. »

C’est écrit dessus…

La sérigraphie des extincteurs répond à des normes, des obligations, et des règles édictées par l’Apdad et autres organismes. La grande majorité porte des pictogrammes de mise en œuvre simples et lisibles, compréhensibles par tous. On enlève la goupille, on baisse le levier de commande, on vise la base des flammes, on presse la détente. Tout est dit, mais si l’on se penche un peu mieux sur les inscriptions, on note les marquages CE (et le numéro d’agrément), apportant le crédit européen, la marque NF garantissant l’origine et la qualité contrôlée du produit, ainsi que, pour certains extincteurs, une petite barre marine qui concerne les bâtiments navigants. On notera aussi les indications au type de feu (A, B, C, D, I) et le type d’agent extincteur.

Eurofeu dispose des armes de son ambition : huit camions très équipés, en deux tailles, véritables « maisons du feu » sur roues, pouvant reproduire les différents types d’incendies, avec fumée, flammes, et autres éléments réels, emploi d’extincteurs et de matériels ad hoc comme les appareils respiratoires, etc. Le véhicule intègre même sa propre salle de cours, en cas de carence du client, et le tout est disponible rapidement sur toute la France.

« Nous pouvons, avec cet équipement, “traiter” des dizaines d’apprenants, explique la responsable. Le coût est très variable, entre formation traditionnelle de base, qui reviendra aux environs de 600 € la demi-journée, mais qui ne demandera que le déplacement d’un technicien, et cours plus complet, avec camion, aux alentours de 3 500 € la journée. Auparavant, nous aurons fait un audit, étudié la société et ses risques, son équipement, ses moyens en sécurité, etc. afin de cerner au plus près le service que nous pouvons apporter. Entre un simple ERP et un site Seveso, les différences sont grandes, mais tout reste possible. Nous sommes très polyvalents, ouverts à tous, et à toutes les situations, et ne tenons pas compte de la marque des outils présents chez notre client. Qu’il soit équipé en Eurofeu ou en tout autre marque nous importe peu, pourvu que ses engins soient estampillés NF. »

A quel niveau et à quelles fréquences sont diffusées ces formations ? Là aussi, l’adaptation est le maître mot, le tout découlant de très nombreux paramètres inhérents au demandeur, et aux décisions prises en la matière par ses dirigeants. Des contrats peuvent être rédigés, assurant dans le temps des visites à fréquence définie des formateurs, tandis que les services apportés font l’objet d’une rédaction pointue des objectifs. Pour Virginie De Paw, cette activité à un bel avenir devant elle, grâce à l’attention de plus en plus fréquente portée à la sécurité par les entrepreneurs qui en ont compris les impératifs. La législation renforce cette orientation, avec des textes européens plus exigeants, et plus précis, cataloguant au plus près les risques et les dangers par secteur d’activité, par produit, par destination, etc.

« La formation est une de nos missions les plus importantes, rappelle Roger Desautel, P-dg de la société éponyme, et président du Syfex (lire encadré). Le rôle des fabricants est de sensibiliser l’acheteur et l’utilisateur à l’emploi de nos matériels, mais aussi de leurs qualités certifiées par des mentions comme Made in France. Former, c’est lutter par avance avec efficacité contre l’incendie, et l’extincteur est une arme redoutable s’il est manipulé de manière rapide et correcte. Nous ne devons donc pas, dans le cadre formatif, nous contenter de démontrer son emploi, mais enseigner les différentes méthodes d’intervention… »

Définir un cadre précis

Toute bonne formation à la prévention, et notamment à l’emploi des extincteurs, vise plusieurs objectifs : connaissance des types de feux, choix de l’agent extincteur approprié, maîtrise des appareils, lutte efficace contre l’incendie tout en étant sécurisé au maximum.

La connaissance technique des classes de feux, des produits et des outils les combattant, sont à la base de ces principes. Les formateurs doivent donc présenter ou proposer un large spectre d’enseignement, afin d’aborder tous les aspects nécessaires à l’extinction. Ceci afin d’inculquer aux apprenants les bons réflexes d’action en cas de déclenchement d’un incendie, sans qu’ils aient à s’interroger sur la mise en œuvre des moyens alors que toutes les secondes comptent. D’où l’importance des démonstrations faites in situ sur les sites à protéger, mais aussi la valeur des cursus dispensés à des individus qui ne sont pas des pompiers de vocation.

On notera l’importance du marquage et de la sérigraphie apposées sur les extincteurs. Il s’agit en fait d’une sorte de mode d’emploi, qui permet, en quelques instants, d’appréhender le fonctionnement et la mise en œuvre sans crainte d’échec. On relèvera également l’importance de l’installation par elle-même ainsi que sa maintenance, qui seule peut garantir le bon état des appareils, et la certitude de pouvoir les déclencher en cas de malheur. Il ne faudra cependant pas oublier l’analyse du Syfex qui souligne qu’« une installation d’extincteurs, même parfaitement maîtrisée et réussie, n’a d’intérêt que si le personnel a été familiarisé avec son utilisation. C’est alors que l’investissement en matériel portera finalement ses fruits ».

L’action du Syfex

Syndicat regroupant les professionnels de l’extinction, le Syfex, affilié à la Fédération française de matériel incendie (FFMI) représente plus de deux millions d’extincteurs fabriqués annuellement. Les marques les plus importantes, Andrieu, ROT, S.A.F.E., Parflam, Isogard, Desautel, y sont rattachées, toutes proposant des matériels strictement en accord avec les règlements français et européens. Il est à l’origine de nombreuses initiatives, comme le CAP d’agent vérificateur des extincteurs, créé en 1997, qui encadre avec précision les fonctions de ce technicien. Avec plus de 15 millions d’extincteurs vérifiés annuellement, les 4 000 vérificateurs diplômés ont démontré leur utilité en matière de prévention, tout en apportant un crédit à leur activité. La formation reste pour le Syfex une priorité, ses dirigeants estimant « que l’apprentissage à la manipulation des extincteurs est un impératif absolu ». C’est aussi une nécessité technique pour toute l’entreprise, partant du constat (dixit Syfex) que « le combat contre le feu est avant tout un combat contre le temps où la rapidité de décision et d’action sont les facteurs prédominants de la réussite de l’extinction. »

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