Gérer les risques
Aujourd'hui et demain

Risque incendie

David Museur (RiskAttitude) : « Entreprises : attention aux risques d'incendie lors de vos travaux d'entretien durant l'été »

Interview de cet enseignant en maîtrise des risques à l’École des Mines, à l'école d'ingénieur du Centre des études supérieures industrielles (Cesi) et au master Méthodes informatiques appliquées à la gestion des entreprises (Miage) de Nice-Sophia-Antipolis (Alpes-Maritimes). David Museur est également fondateur de la start-up RiskAttitude qui cartographie les risques pesant sur une organisation.

Comment se pose la question du risque incendie en été pour les entreprises ?
C’est une question qui va de l’étincelle à l’incendie ! Quel que soit son secteur d’activité, une PME procède toujours, soit occasionnellement ou régulièrement, à des travaux d’entretien ou de rénovation. Généralement, ces travaux se déroulent en été pour profiter de l’accalmie en période de vacances. Certains de ces travaux nécessitent d’utiliser des machines portatives tournantes comme les ponceuses, les disqueuses, les meuleuses, les tronçonneuses ou les postes de soudure. Ces machines sont susceptibles de projeter des étincelles, des flammes ou de la chaleur. Ces “travaux par points chauds” sont susceptibles d’être à l’origine d’incendies. Bien sûr, ils doivent aussi faire l’objet d’une grande attention. Des mesures de prévention et de surveillance doivent être prises avant, pendant et après les travaux. Dans de nombreux cas un  »permis de feu » est nécessaire.

En quoi consiste ce  »permis de feu » ?
C’est un document délivré par l’assurance de l’entreprise qui l’autorise à effectuer les travaux susceptibles de créer des risques de prises de feu. Ce document rappelle les instructions impératives à respecter et doit être signé par le donneur d’ordres et par la personne chargée du travail. Cette procédure est exigée par les assureurs lorsque le travail est effectué par une entreprise extérieure mais également lorsque c’est le personnel de l’entreprise qui le réalise. Pour certaines installations classées, cette procédure est obligatoire. Pour toutes les entreprises assurées pour l’incendie, l’obligation est contractuelle. Dès lors, les assureurs dommage et responsabilité civile peuvent prévoir des sanctions au cas où l’entreprise ne respecte pas cette formalité, par exemple, une franchise de 10% du montant des dommages.

Quels sont les points-clés à vérifier ?
Les risques les plus menaçants sont souvent les moins visibles. Par exemple, un incendie peut couver plusieurs heures après les travaux et les premières flammes apparaître en dehors des heures de travail : les particules incandescentes peuvent se glisser dans une fente, un trou, un faux plancher, un faux plafond, sous un stockage de matières combustibles, sur des structures empoussiérées, etc… Aussi il est recommandé de désigner un responsable pour le permis de feu dans l’entreprise et former le personnel à l’utilisation de la procédure. Il est utile également de donner des instructions écrites aux éventuels intervenants extérieurs.

Quelles sont les actions concrètes à mener ?
Dans leur ensemble, les actions préventives listées dans le permis de feu doivent être mises en place avant l’intervention. Je citerai l’évacuation ou la protection des matériaux combustibles présents dans la zone de travail. Il faut aussi vérifier les éléments de construction (toiture, panneaux isolants en mousse de polyuréthanne) et les contiguïtés (transmission de la chaleur par conduction sur des canalisations), protéger les ouvertures, interstices et fissures ou encore vérifier l’absence d’atmosphère explosible, si le travail doit être effectué dans un volume creux.

Qu’en est-il des outils utilisés dans le cadre des travaux ?
Bien sûr, il s’agit également de contrôler l’état des équipements destinés aux travaux : détendeurs non étanches, tuyaux détériorés, vannes, robinetterie, raccords inadaptés, endommagés… Cela ne doit pas empêcher de mettre en place des moyens de lutte contre un début d’incendie : extincteurs, RIA. Lesquels doivent être en bon état et prêts à fonctionner. Il convient aussi de les mettre à disposition d’un personnel sachant les utiliser. Ainsi la dernière mesure préventive consiste à vérifier le contenu du permis de feu et si les conditions de travail sont conformes au permis préalablement établi.

Et côté mise en œuvre ?
Lors des travaux, il s’agit de contrôler la projection des particules incandescentes, vérifier l’absence de propagation de la chaleur dans les locaux contigus . En particulier la transmission thermique par les canalisations. Bien sûr, il faut se tenir prêt à alerter les secours extérieurs et rester sur les lieux de l’intervention pour éteindre tout début d’incendie. Après les travaux, il est important d’inspecter les lieux des travaux, les superstructures ou infrastructures voisines, les locaux adjacents et maintenir une surveillance durant les 2 heures qui suivent. Dans la même logique, il convient aussi, après la fin des travaux, d’arrêter les travaux par points chauds au moins 2 heures avant la cessation des activités quotidiennes de l’établissement.

Le coût de ces mesures est dérisoire…
En effet. Ils se cantonnent au temps nécessaire pour bien rédiger le permis de feu et d’en appliquer les consignes. La rentabilité, c’est le coût financier mais aussi l’impact psychologique sur le personnel ainsi que sur l’organisation de l’entreprise si un accident avait lieu alors qu’il aurait pu être éviter.

Propos recueillis par Erick Haehnsen

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