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Sûreté et sécurité

Bilan au Sénat de la loi SILT : un équilibre entre prévention du terrorisme et protection des libertés

La mission de contrôle de la loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme (SILT) a dressé ce mercredi 26 février le bilan d’application des mesures provisoires qui prennent fin le 1er novembre 2020. À l’issue de ses travaux, la commission des lois du Sénat préconise leur pérennisation.

Vue du palais du Luxembourg.

La commission des lois du Sénat suggère de pérenniser les quatre mesures de la loi SILT qui ont fait,l’objet d’un contrôle et d’un suivi par la mission pluraliste. © Sénat

La loi du 30 octobre 2017 visant à renforcer la sécurité intérieure et la lutte contre le terroriste, dite « loi SILT », a introduit dans le droit commun diverses mesures inspirées des dispositions de la loi du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence. Objectif : assurer une sortie maîtrisée de l’état d’urgence sous lequel la France vivait depuis deux ans, en raison des attaques terroristes meurtrières de Charlie Hebdo et du vendredi 13 novembre 2015. À l’initiative du Sénat, les quatre mesures considérées comme les plus sensibles au regard du respect des droits et libertés constitutionnellement garantis ont revêtu un caractère temporaire et arriveront à échéance le 31 décembre 2020. Les quatre mesures concernées portent sur les périmètres de protection, la fermeture des lieux de culte, les mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance (MICAS) et les visites domiciliaires et saisies.

32 personnes entendues par la mission de contrôle du Parlement

Pour évaluer l’efficacité et la pertinence de ces mesures, la loi a attribué au Parlement des pouvoirs de contrôle renforcés qui se sont traduits par la transmission sans délai au Parlement d’une copie de l’ensemble des actes administratifs pris en application des quatre mesures temporaires en question ainsi que par la remise de deux rapports annuels d’évaluation de l’application de la loi par le gouvernement au Parlement en janvier 2018 et en février 2019. Il faut dire que la commission des lois avait créé, le 21 novembre 2017, une mission pluraliste chargée d’assurer le suivi de la mise en œuvre des quatre mesures temporaires afin que le Sénat puisse décider, en toute connaissance de cause, avant leur expiration, de les pérenniser ou non. La mission a alors entendu, à l’occasion de treize auditions, les principaux acteurs, administratifs comme judiciaires, impliqués dans la mise en œuvre des dispositions de la loi. Elle a également réalisé deux déplacements : l’un à Lille, pour recueillir l’expérience des acteurs de terrain ; l’autre à Bruxelles, pour observer les dispositifs de lutte antiterroriste développés dans un pays également fortement concerné par le phénomène de la radicalisation et par le terrorisme islamiste. Au total, 32 personnes ont été entendues au cours de ces deux années de travaux.

Dans deux décisions rendues en février et mars 2018, le Conseil constitutionnel avait conclu à la conformité à la Constitution de l’essentiel des quatre mesures temporaires… à l’exception de dispositions ponctuelles relatives au contrôle du juge administratif sur les MICAS, d’une part, et aux saisies susceptibles d’être effectuées dans le cadre de visites domiciliaires, d’autre part. La loi du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice a alors procédé aux ajustements législatifs nécessaires à la correction de cette double censure du Conseil constitutionnel.

Application mesurée et conforme à l’esprit de la loi SILT

Les statistiques témoignent d’une application équilibrée des nouvelles mesures. En effet, entre le 1er novembre 2017, date de l’entrée en vigueur de la loi SILT, et le 31 décembre 2019, 504 périmètres de protection ont été instaurés sur l’ensemble du territoire national. Puis, sept lieux de culte ont fait l’objet d’une fermeture administrative et 229 mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance ont été prononcées à l’encontre de 205 personnes présentant des signes de radicalisation. Par ailleurs, 149 visites domiciliaires ont été autorisées par le juge des libertés et de la détention. Pour leur part, les membres de la mission pluraliste estiment que, sur le plan qualitatif, les quatre mesures ont été mises en œuvre dans le respect de l’esprit du législateur. Lequel avait souhaité limiter leur application « aux seules fins de prévention du terrorisme ». En témoigne le faible nombre d’annulations prononcées par le juge administratif. Ainsi, au 31 décembre 2019, seules cinq MICAS sur 87 ont été suspendues ou annulées. Quant aux sept recours formés à l’encontre des fermetures de lieux de culte, ils ont été rejetés.

Des mesures pertinentes à pérenniser

Au cours de ses travaux, la mission pluraliste a constaté un consensus de l’ensemble des acteurs judiciaires et administratifs sur l’efficacité des quatre mesures introduites par le législateur dans un contexte de menace terroriste durable et élevée. C’est pourquoi, à l’occasion du bilan sur la loi SILT dressé ce mercredi 26 février, la commission des lois du Sénat suggère de les pérenniser. Toutefois, les deux premières années de mise en œuvre permettent de conclure à la nécessité d’y apporter certains ajustements ou compléments afin d’assurer la pleine efficacité de l’arsenal antiterroriste. A suivre.

Erick Haehnsen

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