Gérer les risques
Aujourd'hui et demain

Risques industriels et environnementaux

Daaf, en attendant la loi...

La loi généralisant l'installation de détecteurs avertisseurs autonomes de fumée ou DAAF à tous les logements, attend toujours le vote du Sénat...

Tant dans le domaine privé que professionnel, la réglementation concernant la protection contre l’incendie devrait être l’élément phare et essentiel dans l’acte de construire ou de rénover et sa détection le maillon primordial, car c’est d’elle que dépend le plus souvent la vie des occupants d’un bâtiment. D’une manière générale, dans les établissements recevant du public (ERP) depuis 1982 et les immeubles de grande hauteur (IGH), les moyens et les systèmes de détection font partie à part entière des Systèmes de sécurité incendie (SSI). Ces systèmes sont reliés à une centrale de détection qui a pour vocation de gérer toutes les informations qui lui sont transmises. Ces installations sont d’autre part décrites dans le référentiel de l’Assemblée plénière des sociétés d’assurances dommages (Apsad) document R7, édité par le Centre national de prévention et de protection (CNPP). De son côté, la partie détection du Centralisateur de mise en sécurité incendie (CMSI) est régie par la série de normes européennes série EN 54 et le CMSI par la série de normes françaises NFS 61-930 à 940. Il fait également l’objet d’une certification NF SSI. Il est à noter toutefois que, dans les ERP, les chambres sont considérées comme lieux privés et ne sont donc assujetties à aucune réglementation particulière concernant la détection, seuls les couloirs de distribution doivent répondre à des obligations spécifiques.
En ce qui concerne les industries et à défaut de réglementation bien spécifique, les compagnies d’assurances prennent de plus en plus pour modèles les règles appliquées pour les ERP. Pour le Groupement français des industries électroniques de sécurité Incendie (Gesi) membre de la Fédération française du matériel incendie (FFMI), il n’en reste pas moins que la mise en place d’une réglementation concernant les systèmes de détection et d’extinction serait souhaitable afin d’amenuiser bon nombre de conséquences désastreuses pour l’environnement comme celles par exemple concernant le rejet des eaux d’extinction souillées ou polluées dans les rivières ou dans les nappes phréatiques. Pour ce qui est des logements collectifs et pavillonnaires malgré une proposition de loi, le problème reste entier…

Un incendie toutes les deux minutes

Dans leur dossier de presse d’octobre 2004, la FFMI et le Groupement des fabricants installateurs distributeurs mainteneurs en sécurité incendie domestique (GIFSID) rappelaient déjà que les incendies domestiques faisaient chaque année en France plus de 10 000 victimes, dont près de 800 décès et révélaient ces quelques statistiques :
> 1 incendie domestique se déclare toutes les 2 minutes en France,
> 70 % des incendies domestiques meurtriers ont lieu la nuit,
> 250 000 sinistres incendies domestiques sont déclarés en moyenne par an,
> l’intoxication est à l’origine de 80 % des décès,
> le feu est la première cause de mortalité chez les enfants de moins de 5 ans,
> pour 1 000 décès causé par un incendie on compte 15 000 personnes handicapées.
Ces chiffres mettent tristement en exergue le manque total de culture de la prévention du risque incendie chez les particuliers et surtout l’absence de toute réglementation pouvant viser à assurer leur protection. En effet dans la grande majorité des pays industrialisés les détecteurs avertisseurs autonomes de fumée sont obligatoires et permettent ainsi de réduire très fortement le risque de décès lors d’un incendie se déclarant chez soi.

Une loi pour enrayer l’hécatombe…

Le projet de loi, qui a été présenté à l’Assemblée nationale le 28 septembre 2005 par Messieurs Pierre Morange, député des Yvelines, et Damien Meslot, député de Belfort, a bien été adopté en première lecture par l’Assemblée nationale le 13 octobre 2005. Elle vise à rendre les détecteurs avertisseurs autonomes de fumée obligatoires dans les logements qu’ils soient anciens ou neufs, collectifs ou individuels.
Ce projet de loi, lequel est appuyé par bon nombre d’organisations professionnelles – qu’ils s’agisse des sapeurs pompiers, des associations de victimes ou des médecins spécialistes de la grande brûlure – est malheureusement toujours en attente de son vote au Sénat depuis près d’un an. Cette situation est d’autant plus regrettable que, selon la Direction générale de l’Urbanisme, de l’habitat et de la construction, lors du colloque du 7 juin organisé par Damien Meslot, les décrets et arrêtés qui la rendraient effective sont déjà pratiquement prêts. Une situation d’autant plus regrettable que l’installation dans les logements de ce type d’appareils, permettrait de réduire de 50 à 75% le nombre des victimes directes ou indirectes des incendies. Ces chiffres obligent à se demander pourquoi un tel projet de loi d’utilité publique visant à préserver des vies humaines est toujours en attente de son vote au Sénat ?

…et des détecteurs pour l’y aider

On recense plusieurs types de détecteurs photoélectriques, explique Claire Moscicki, conseil en prévention et communication sociale. Le détecteur avertisseur autonome de fumée est le modèle le plus répandu dans le monde. Il fonctionne avec une pile. Ce fonctionnement lui garantit une autonomie de fonctionnement qui peut aller de 1 à 5 ans, selon le type de pile. La pile au lithium – dioxyde de manganèse – est particulièrement indiquée pour ce type de détecteur. Cette alimentation par pile est essentielle parce que le court-circuit électrique peut soit être à l’origine d’un feu naissant chez soi, soit en être la conséquence. Ce type de détecteur est pour un appartement dont la surface est inférieur à 80 m2 sans mezzanine, un mobil home, une caravane, un petit bateau de plaisance. Il convient d’en installer au moins deux, dès lors que la surface habitable est supérieure à 80 m2.
Les détecteurs avertisseurs autonomes de fumée photoélectriques » filaire », quant à eux, fonctionnent également avec une pile. Plusieurs détecteurs peuvent être reliés entre eux à l’aide d’un fil électrique, sans qu’ils soient pour autant reliés au secteur : chaque détecteur conserve son autonomie de fonctionnement grâce à sa pile. Le report d’alarme se fait automatiquement à tous les Daaf, lorsque l’un d’eux se déclenche dans l’habitation. Les détecteurs avertisseurs autonomes de fumée photoélectrique avec relais  » radio  » fonctionnent, également, avec une pile. Un émetteur récepteur radio, inclus dans le Daaf, permet le report d’alarme dès que l’un des détecteurs déclenche son alarme. Jusqu’à 12 détecteurs peuvent ainsi communiquer entre eux dans une même habitation. Le report d’alarme se fait par radio d’un détecteur à un autre. Ils présentent les mêmes avantages que les détecteurs filaires. Ils sont vraiment adaptés en habitat pavillonnaire à étages, aux appartements comportant une mezzanine ou lorsque les chambres sont éloignées les unes des autres du fait de grands couloirs. Enfin, les détecteurs reliés au secteur sont particulièrement intéressants dans les logements pavillonnaires à étages ou comportant une annexe. Ces détecteurs doivent être posés par un électricien ou par un bricoleur chevronné : leur installation s’inscrit donc naturellement dans un projet de réhabilitation de l’installation électrique ou dans un projet de construction. Chacun des détecteurs installés doit comporter une pile de secours permettant le fonctionnement du Daaf en cas de coupure de courant.

Des Daaf oui, mais pas n’importe lesquels…

Plusieurs incendies meurtriers, un projet de loi, une campagne nationale de prévention soutenue, un marché fabuleux visant un large public pas toujours bien informé, une simplicité d’installation, il n’en fallait pas moins pour faire naître des vocations commerciales pas toujours compétentes. Très vite, les rayons des magasins se sont remplis et de nombreux sites marchands ont fleuri sur Internet. Mais qu’en est-il exactement ? Que valent tous ces produits ? Sont-ils vraiment fiables ? Répondent-ils à une norme quelconque ? Sont autant de questions qu’il est nécessaire de se poser avant tout achat. Un marché fleurissant peut cacher de mauvaises surprises… En effet, comme le rappelle Claire Moscicki,  » on ne pourrait qu’être satisfait si les produits proposés à la vente étaient tous certifiés conformes aux normes reconnues en France ou en Europe, garantissant ainsi leur fiabilité en cas d’incendie chez soi et, si les arguments publicitaires développés par les uns et les autres procédaient d’une véritable démarche de qualité et non de mensonges ou d’abus de la part de certains se présentant comme des « professionnels’’ du secteur. Malheureusement, la réalité est tout autre.  » Le fait d’inscrire sur un emballage que  » le détecteur est conforme à la proposition de loi rendant obligatoire l’installation de détecteurs de fumée dans tous les lieux d’habitation « , ou de faire savoir que  » le Daaf est obligatoire depuis le 13 octobre 2005 « , sous prétexte que la loi a été votée à l’Assemblée nationale en octobre 2005, sont des propos fallacieux qui peuvent se retourner contre leurs auteurs. Il s’agit là de publicités mensongères, cette loi n’étant toujours pas effective. S’équiper en détecteur de fumée est Indispensable, même si cela n’est pas encore obligatoire.

Norme CE, marque CE et marquage CE : attention à la confusion

De nombreux revendeurs utilisent les vocables  » conforme à la norme CE  » ou  » Norme CE  » pour laisser croire que le Daaf est conforme à une norme européenne. En réalité, il n’existe aucune norme CE, aucune marque CE. Le marquage CE est obligatoire pour tous les produits soumis à une ou plusieurs directives européennes  » Nouvelle Approche « . Il indique que les produits respectent les exigences générales, dites essentielles, en matière de sécurité, de santé, d’environnement et de protection du consommateur.
L’apposition d’un symbole visuel  » CE  » qui matérialise la conformité du produit à ces exigences est également réglementaire et obligatoire pour tout Daaf vendu en Europe, et donc en France. Il atteste d’abord que le Daaf ne présente pas de danger pour l’utilisateur ou son environnement. Il atteste ensuite que le Daaf est conforme à deux directives  » Nouvelle Approche  » : la directive Basse tension et la directive Compatibilité électromagnétique des appareils électriques et électroniques (voir encadré page… : Directives DBT et CEM).
Le marquage CE n’est pas obligatoirement un gage de qualité des Daaf. En effet, le fait qu’un DAAF ne soit pas dangereux pour l’utilisateur et son environnement, n’implique pas qu’il est capable de détecter la fumée d’un feu naissant et d’alerter les victimes dès sa naissance. Le marquage CE ne garantit ni la qualité, ni la conformité du Daaf à une norme en vigueur. À condition de pouvoir produire une attestation de conformité aux directives européennes, les fabricants apposent eux-mêmes le marquage CE sur chaque produit. Il s’agit là d’une procédure auto-déclarative. Dans ces conditions, il est très difficile pour le particulier non averti de distinguer un produit présentant de bonnes performances techniques d’un produit bas de gamme. L’estampille NF est là pour les aider.

NF : pour l’engagement de son titulaire

En l’absence d’une norme européenne, devant l’afflux de Daaf de qualité douteuse en France et le danger qu’ils représentaient pour les usagers dans le cas de non déclenchement, les ministères compétents, les sapeurspompiers français et la commission de la sécurité des consommateurs ont demandé, dès 1996, la création d’une norme française et d’une certification volontaire française afin de garantir aux consommateurs que les Daaf vendus en France puissent offrir un niveau optimum de qualité et de fiabilité et puissent être testés et contrôlés régulièrement par un organisme tierce partie, indépendant et rigoureux. Certains fabricants ou distributeurs déclarent leurs produits comme étant  » conformes à la norme française « . Il s’agit, là encore, d’une procédure auto-déclarative de leur part. Seule la certification par un organisme tierce partie indépendant, peut garantir que le Daaf est réellement conforme à cette norme française. En France, c’est l’Afaq Afnor Certification qui certifie cette conformité à la norme française NF S 61-966 (voir encadré page 31 : La norme NFS 61 966 : fiabilités et spécificités). C’est encore cet organisme qui sera habilité à certifier les Daaf selon la nouvelle norme européenne EN 14 604. Cette nouvelle norme prendra effet au plus tard en juillet 2008.
Quelle que soit la norme certifiée, seuls les produits qui ont été certifiés par la marque NF, peuvent présenter l’estampille de la marque NF sur le Daaf lui-même. Pour le Comité national malveillance incendie sécurité (CNMIS), dont la mission consiste à faire respecter les normes françaises et européennes ainsi que les directives européennes concernant les produits, les matériels, les systèmes et les services liés à la sécurité incendie, le message est on ne peut plus clair : un Daaf certifié NF est avant tout un produit exclusivement optique, dont l’ergonomie a été validée de manière à limiter les risques de mauvaise utilisation ( » oubli  » de la pile, montage de la pile à l’envers, etc.)
C’est en juillet 2008 que prend fin la période transitoire et que la norme EN 14604 devrait se substituer à la NFS 61-966, ce qui ne laisse que peu de temps aux différents intervenants pour fixer des procédures unifiées réclamées par le Gifsid.

En savoir plus

Cet article est extrait du Magazine APS 153 – numéro de Septembre 2006.
Pour plus d’information sur nos publications, contactez Juliette Bonk .

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